J'ai revu cette même interprète le 14 et l'impression a été toute autre! compte rendu à suvire d'ici quelques jours; celui-ci ne parle que de la représentation du 10 et n'est pas du tout conforme à mes impressions du 14; cela veut dire que des artistes de cette trempe sont capables en trois jours, de faire considérablement évoluer leurs personnages!
Myriam Ould Braham est une Giselle classique : timide, candide, douce et pleine de tendresse pour sa mère et pour le prince (Mathias Heymann) qui lui rend visite, elle repousse avec douceur Hilarion et semble presque s’excuser de ne pouvoir l’aimer ; elle est si délicate qu’on ne s’étonne guère qu’après avoir appris la trahison d’Albrecht, elle perde l’esprit et le contact avec le monde réel. Malgré une danse d’une grande beauté dans laquelle toutes les qualités citées sont apparentes, Ould Braham me convainc moins en Giselle qu’en Nikya cet hiver ; son personnage est plus en retrait, mais malgré tout, jolie et naturellement gracieuse, Myriam Ould Braham est délicieuse en scène.
Sa scène de la folie reste assez sage et sa mort aussi ; elle nous raconte une histoire, elle le sait et nous aussi ; c’est sans doute la raison pour laquelle nous restons donc en lisière de celle-ci, conscients que nous sommes au spectacle.
A ses côtés, Mathias Heymann avec sa danse vive, moelleuse et son sourire plein de candeur est un jeune homme fougueux, fou-amoureux de sa Giselle mais aucunement un prince ; rien ne le différencie vraiment des vendangeurs qui rentrent le soir au village ; il est simple, spontané, sans autorité ni majesté ; un peu du Roméo de ce printemps est resté accroché à lui ; son face à face avec Hilarion est à son désavantage car c’est Vincent Chaillet/Hilarion, le garde chasse, qui a largement le dessus même si celui-ci s’éclipse comme le veut la mise en scène.
Le couple Albrecht/Giselle est un couple qui s’aimera dans la mort comme il s’est aimé dans la vie, avec une sincérité absolue. Au second acte, Giselle accompagne de sa tendresse son cher Albrecht qu’elle protège de toute la force de son cœur ; moins ombre que bonne fée bienveillante, ses variations ne se teintent nullement de mystère ou de la solitude poignante dans laquelle la mort a jeté Giselle en la séparant de ceux qu'elle aimait. En sortant de la tombe, elle est restée celle qu'elle était dans le monde des vivants : aimante, douce, bienveillante, prenant soin de ceux qu'elle aime.
A ses côtés, la Myrtha de H. Bourdon fait peur ! Gare à celles de ses Willis qui ne lui obéiraient pas ; ses grands jetés sont dansés en force et manquent d’immatérialité, de même que les petits pas glissés du début, trop terrestres. Elle pointe ses doigts vers le sol avec la brutalité de la fée Violente dans la Belle. C'est une façon de voir le personnage : "l'implaccable" Myrtha. Mais cet esprit frappeur ne me séduit pas. Froideur virginale ne signifie pas forcément sécheresse ou brutalité...
De la sorte, le second acte a cruellement manqué de magie, de mystère, et surtout, de ce souffle romantique qui parcourt l’œuvre de Gautier, Hoffmann ou les premiers poèmes de V. Hugo, malgré le superbe travail du corps de ballet.