Il y a quelques temps, ( un peu plus de deux ans) Sylvie Guillem publiait ses propres autoportraits. Elle avait pris les choses en main, car n'aimait pas du tout ce que lui proposait le magazine Vogue : les photos n'étaient pas " elle" mais la vision que le photographe avait d'elle.
La prodigieuse envie de se montrer vraiment lui donne l'audace de réaliser une série d'autoportraits d'elle, nue et parfois grimançante. Cela, une fois encore, choqua beaucoup. Le Monde décide de l'interwiever, pour comprendre la démarche bizarre d'une étoile, si belle sur scène, qui se prend en photo sans se travestir, sans maquillage, véritablement "à nu et sans fard". Comme si elle en avait assez " de faire rêver"
Singulière démarche, n'est ce pas, que celle de vouloir briser une image trop lisse d'une belle femme en tutu et diadème, dotée de jambes magnifiques, d'une silhouette altière et élégante, et d'en montrer toute la force, toute la puissance, toute l'androgynie, laissant résolument de côter paillettes, diadèmes, maquillage, costume qui embellissent mais travestissent aussi...
Sylvie s'explique : " je n'ai jamais pu me défaire de la certitude de n'être pas comprise ( ...) appréciée pour ce que je suis. (...) je n'ai jamais de contacts vrais ( ...)
quels aveux...!!! ainsi, pour rompre cette muraille, cette démarche sera suivi par celle de la publication de son livre de photos qu'elle nomme " Invitation" . Un énorme livre,au dimension surréaliste, qu'on ne peut même pas ranger dans une bibliothèque normale. A t'elle donc peur qu'on oublie son livre sur le coin poussiéreux d'une étagère pour l'avoir doté de telles dimensions?
En tous cas, sous l'éclairage de ces aveux, ce titre, "invitation", s'éclaire!!! C'est comme un appel à venir voir qui elle est vraiment, à partager un peu d'elle, à être comprise enfin!
Dans l'interwiev, elle revient aussi sur ses année de danse, défend aprement Claude Bessy qui est au coeur d'une polémique : la DASS a établi un constat alarmant du mauvais traitement que subissent les petits rats à l'école de danse : alimentation carencée, cas d'anorexie, blessures, etc...
Elle dit, non sans virulence mais aussi courage : " ceux qui sont poussés par les parents sont les plus malchanceux, mais ce n'est ni a faute de Claude Bessy, ni celle de l'institution. (...) L'école est là pour former les meilleures( ...) Personne ne peut nier que l'entrainement est dur, mais l'école hotelière, vous croyez qu'elle est facile?(...) si une fille commence à faire la montgolfière, il faut lui dire : " mademoiselle, ou vous perdez du poids ou vous ne pouvez pas rester"
cela à le mérite d'être clair : le coprs est l'outil, et il ne peut pas être " gros"!
A propos de son départ de l'Opéra elle explique : " je m'étais aperçue que je n'avais pas que des amis... j'étais en pleine bataille avec moi même, les autres, avec l'opéra de Paris. (...) Noureev voulait savoir où j'étais capable d'aller pour conquérir ma liberté. On y a vu un caprice de diva alors que je suis la discipline même! ( ...)
Déjà, dans les années 1985, ce sentiment d'être incomprise... c'est peut être de ces multiples contradictions, révoltes, défis, que Sylvie tire sa force extraordinaire... de son désir de lutter pour être elle même et accepter comme elle est, qu'elle vivifie de cette énergie tous les personnages qu'elle incarne... et c'est peut être pour cela aussi que son rôle de Giselle m'a déplu :
car Giselle, dans le ballet romantique se soumet, accepte, pardonne.... Giselle est l'abandon même...
peut être Guillem lui a t'elle donné trop d'elle même, de sa propre force, de sa passion et de sa révolte?... ce qui est en total désaccord avec la nature de Giselle qui meurt parce qu'elle ne peut supporter la vérité... et rejoint alors le royaume des Ombres...
On comprend alors mieux que le Japon, la poterie qu'elle fait en silence, au milieu de Japonais avec qui elle n'échange pas de mots, mais avec qui elle se sent en confiance, en harmonie, la mette en paix avec elle même, au moins temporairement...
photo extraite du site de Sylvie guillem
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