Danses et yoga ?
Il est assez fréquent actuellement de voir que les danseuses Tribal, les danseurs classiques, certains sportifs - sans parler des actrices et autre people, intègrent le yoga dans leur pratique quotidienne ; Mais qu’est ce que le yoga ? D’où vient-il ? A quoi sert-il ? Comment et où le pratiquer ? Il faut tout d’abord savoir qu’aujourd’hui, il n’y a pas un yoga mais des yogas… il est difficile parfois de s’y retrouver. Et ce phénomène n’est pas propre qu’à l’Occident, puisque plusieurs formes de yoga coexistent aussi en Inde, avec des différences philosophiques énormes malgré l’utilisation d’un vocabulaire semblable.
Origine et shivaïsme :
le natha-yoga L’histoire et l’origine du yoga se confondent avec celle de l’Inde, et ce bien avant l’arrivée des Aryens (1500 ans avant JC) Le Shivaïsme est une philosophie, bien plus qu’une religion, antérieure à tous ce que les Aryens amèneront ensuite avec eux : vedas, lois de Manus, etc… Le Shivaïsme, qui remonte à au moins 6 ou 7OOO ans avant JC, ne connaît pas les castes, pas plus qu’il ne reconnaît la supériorité de l’homme sur la femme. Il pense au contraire que l’être humain est androgyne sur le plan de l’énergie. Le shivaïsme se sert du yoga pour éveiller cette énergie, celle de la mythique kundalini.
Le raja yoga de Pentajali
L’arrivée des Aryens va changer bien des choses… ils arrivent avec leurs castes, leurs vedas… Tout ceci est en contradiction avec le shivaïsme qui lui est libertaire. Cependant, ils reprennent bien des techniques de yoga, mais dans son aspect ascétique, pour se libérer du monde et de son illusion. Il ne s’agit donc plus de se servir de son corps pour faire l’expérience de la réalité du monde, mais de s’en affranchir par des techniques de jeûne, d’abstinence, de prière, cet engagement exigeant de la part du renonçant quinze heures de pratique quotidienne ; pas question donc de mener une vie « normale »… cette branche de yoga très ascétique existe aujourd’hui encore, mais s’adresse à des « renonçants » Aussi, Pentajali est bien embarassé entre les contradictions qui opposent la pensée vishnouïste de la philosophie shivaïste Il va essayer de trouver un compromis : d’où la forme de yoga intermédiaire qui reprend les notions de moralité, d’ascèse des vishnouites, et les techniques de concentrations, de respirations, etc du shivaïsme. Il essaie de concilier l’inconciliable…
Quel yoga aujourd’hui ?
Aujourd’hui, c’est essentiellement cette forme de yoga qui est enseignée de part le monde,
plus ou moins adapté... enf ocntion des cours, l'accent est plus ou moins mis sur l'ascèse ( car les pratiquants du raja yoga sont végétariens et pronent l'abstinence sexuelle)
Parfois l'enseignement du yoga est purement et simplement réduit à sa plus stricte expression : le yoga streching qui ne garde que les postures, vidées de toute substance, de toute pensée : il devient pure gymnastique…
Il existe même une nouvelle sorte de " yoga" qui enchaine les postures en un temps record, transformant ces techniques de concentration intense en séance d’aérobic… Où est l’esprit du yoga dans tout cela ?
Le Yoga de Rachel Brice se rattache au raja yoga de Pentajali ; en stage, Rachel ne conserve malheureusement que l’aspect "gymnastique" du yoga, tout comme sur son dvd… mais je la soupçonne de pratiquer autrement pour elle-même…
Comme elle, beaucoup de danseuses ne gardent que les "postures" du yoga, sans leur ajouter les techniques de respiration et de concentration qui leur donne leur sens. Elles ne s’adressent plus qu’au corps physique, niant ainsi le corps énergétique et mental qui sont obligatoirement pris en compte par le véritable yoga.
Les danseuses de tribal utilisent donc souvent le yoga pour la souplesse, pour le renforcement musculaire. D'ailleurs, c'est une idée fausse de croire que le yoga vise à l'hyper-souplesse... ce n'est nullement le but recherché...
Celles qui pratiquent le yoga de Pentajali ont encore une approche spirituelle du yoga, mais dans sa version plus ascétique que celles qui s’orientent vers celui du mythique Matsyendra, l’un des premiers natha-yogin.
Le yoga que je pratique personnellement, se rattache à la branche du shivaïsme et au tantrisme, qui n’est pas, comme le croit si souvent les Occidentaux, une pratique sexuelle débridée en collectivité, mais un travail personnel et quotidien, rigoureux, sur ses propres énergies, son propre divin et sacré : c'est un yoga pour unir notre polarité lunaire et solaire et arrivée à la fusion intérieure.
Que trouve t’on dans un bon cours de yoga ?
Un travail sur les chakras, et sur le corps énergétique. On parlera aussi des canaux ou nadi, et de l’axe : la sushumna. Par les posture où « asanas » l’énergie est mise sous tension puis transformée via l’alchimie du souffle :le pranayama joue un rôle fondamental, puisqu’il doit s’éveiller autrement. Les postures s’accompagnent de technique oculaire ( drhistis), de mantras associés aux différents chakras, de mudras ( gestes des mains)… et de bandhas ( contraction de la base, de la gorge, du ventre) Seules, deux ou trois postures sont pratiquées pendant la séance, mais chacune sur une durée d’au moins sept à 10 minutes, voir beaucoup plus pour une pratique approfondie Puis suivent un mudra, une technique de respiration, et une concentration ou méditation…
Quel est son but fondamental ?
Les postures visent à une chose : mettre l’énergie sous tension, la purifier, pour libérer les tensions dans le corps physique, énergétique et mental, qui tous trois sont liés. Le pranayama, le souffle a un rôle capital dans ces postures et on doit apprendre à l’éveiller et le maîtriser. Les répercussions sur le corps, le mental sont bien sûres bienfaisantes : humeur plus légère, meilleure santé, patience et force sont développées, lâcher prise, concentration… Quand on pratique personnellement avec une visée plus spirituelle, certaines techniques sont pratiquées sur un gathika, c'est-à-dire une durée de vingt cinq minutes environs…temps nécessaire pour que l’énergie tourne vraiment. Ceux qui s’engagent dans une quête absolue peuvent maintenir une posture plusieurs heures d’affilée…
Yoga, danse et chamanisme…
En comparant l'origine de la danse et shivaïsme, on peut établir une parenté entre la danse, son symbolisme, et le yoga des Tantra. Par exemple, toute l’énergie de la danse orientale part du ventre : au ventre est associé le chakra du feu, manipura, « joyau dans la cité » haut lieu de « vie » dans le yoga Le fait que les figures, les huit et autres tournent autour de ce point mettent forcément en résonnance ce centre
D’autres part, beaucoup de figures qui portent des noms d’animaux ou qui font allusion à la Nature dont la danse s’inspire, rappellent les postures nées de l’observation des animaux chez les natha yogin : crocodiles, cobra, chameau, le yoga à son bestiaire Et ce n’est nullement un délire visuel, mais une observation très rigoureuse de l’animal, et de l’énergie qui lui est associée, et que les chamans, aujourd’hui encore savent utiliser
Ainsi, en prenant la posture d’un cobra ou d’un lion, le pratiquant devient lui-même sur le plan de l’énergie ce cobra ou ce lion, et développera les qualités qui lui sont associées
La danse "orientale", en reproduisant le pas du chameau, ou le frémissement du serpent à sonnette, ou le tremblement de la terre, ou l’élément aquatique « maya » s’approprie elle aussi ces qualités, même si cela n’est dit nulle part Cette danse qui plonge très loin ses racines a probablement due à une époque s’approprier l’énergie des éléments ou animaux qu’elle imitait C’est sans doute pour cela que certains parlent de « danse sacrée » En l’absence de texte et de témoignage c’est impossible à affirmer
Mais les natha yogin ont toujours trasmis leur pratique secrètement, de maitre à disciple, sans écrit. Lorsqu’il y eut des écrits, ceux-ci furent rendus obscurs pour ne pas permettre aux non initiés de s’approprier les techniques. Rien n’interdit de penser que dans la danse « pré-orientale » s’est transmise aussi autour de l’idée de l’éveil de l’énergie. Je ne parle bien sûr pas du raqs sharqi ni même du baladi tels qu’ils sont connus aujourd’hui, mais des sources lointaines qui ont donné naissance à ces styles, métissés de toutes sortes d’influences…
Pourquoi cet engouement aujourd’hui ?
Bref, aujourd’hui, l’être humain a perdu sans doute conscience de ce qui le liait à l’univers tout entier : plus il l’investit, plus il se coupe de lui sur le plan de l’énergie Je soupçonne malgré tout l’engouement pour le yoga de recouvrir une vérité profonde dont les adeptes n’ont peut être pas une conscience immédiate : de les remettre au centre d’eux même, de les relier à la part la plus authentique d’elles mêmes.