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  • : Un jour, une œuvre
  • : Créé en 2006, ce blog rédigé par Valérie Beck autrefois consacré à la danse et à ma compagnie se diversifie davantage.
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Noureev

 

Danser, telle la phalène sous la lune, le pinceau du calligraphe, ou l'atome dans l'infini 

                                              

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29 décembre 2009 2 29 /12 /décembre /2009 20:10
 

  Nosferatu a un parfum bien à lui que je garderai longtemps en mémoire.  Oh, rien à voir avec une histoire de vampire qu'on nous raconterait pour nous terroriser, non.
Ce n'est pas narratif, mais il se dégage de cette oeuvre une atmosphère pesante, sombre, où pourtant des moments de pure poésie scintillent tout à coup, comme une arrivée d'air frais au milieu de toute cette noirceur. Dans toute cette obscurité, la chevelure de Juliette Gernez  sera comme un rayon de soleil,  les bras d'Alice Renavand, deux serpents de lumière, la peau de Mitéki Kudo scintille comme sous un clair de lune...

Le décor, réduit, présente dans les cintres une sorte de grand puits d'où vient la lumière, souvent grise, parfois orangée.
La scène est encadrée par de grands piliers de béton. On imagine dans les coulisses la prolongation du décor dévoilé sur scène : des corridors sans fin,  peuplés d'êtres d'un monde sans lumière.
C'est dans ce no man's land souterrain qu'ont lieu ces étranges rencontres. La vampirisation n'est qu'un "signe" de reconnaissance, une appartenance à un clan... comme la " famille" du film " le Survivant" d'après une nouvelle de Matheson...

 

 

 

 


 

 

 

 


 
Sur quatre pièces de Dusapin, certaines un peu conventionnelles, d'autres très inspirées, s'organisent des duos, des solos, des quatuors, des scènes de groupe.
Les danseurs ont d'abord travaillé dans le silence avant de travailler en musique. On le sent à cette pulsation interne et collective qui anime la danse d'une façon assez organique, comme si tous ces corps n'appartenaient qu'à un seul être aux multiples incarnations.
 
La scénographie , difficile à suivre, oblige le spectateur à «  lâcher prise » sur sa façon de recevoir habituellement un spectacle. Il faut se laisser « hanter » pour entrer dans Nosfératu. 

La musique, la danse et la scène peu éclairée obligent a un état d'éveil : les yeux doivent s'habituer à la pénombre, l'esprit, a une mise en scène qui n'est pas linéaire. Les oreilles doivent accepter l' absence de thématique musicale : rien ne peut donc  être relié dans la mémoire. Il n'y aura   pas "d'affect", au sens romantique du terme.  Nosfératu est un ballet qui refuse l'effet.

Que se passe-t-il ?
 Des êtres se retrouvent, dansent, se quittent, se combattent, s'aiment.   
Les corps se tendent, s'agitent, sont frénétiques, enchainent des figures à une vitesse hallucinante, puis c'est le repos, le temps suspendu, le temps d'un duo où tout s'arrête. Les duos, sans être très innovants sur le plan chorégraphiques, sont des moments où le spectateur peut poser son regard, rêver un peu, quitter le monde brut et frénétique de ces rencontres sans logique.
 On ne peut que saluer le magnifique travail de rythme  des danseurs!
Les relachés, les mouvements si rapides qu'on pense impossibles à exécuter, la frénésie incessante qui laisse parfois place à un «  temps suspendu », tout est travaillé en profondeur. Cela demande beaucoup de virtuosité de la part des danseurs. ( sublimes Martinez, Kudo, Isoart, Renavand, Yong, Gernez)

 


 
Pendant tout le spectacle, les questions se pressent sans qu'on puisse s'attarder sur aucune; le temps presse, quelque chose se passe qui ne durera pas, alors on attend, on s'attend à quelque chose...mais la frénésie nous gagne... à quoi assiste t'on? qu'est ce qui se trame dans ces sous sols?

Nosferatu est le genre d'oeuvre qui laisse le spectateur dans un état étrange sans que l'on sache à quoi on a assisté
un peu comme le grand Meaulne quand je le lisais : impossible à chaque fois de me rappeler l'histoire, mais bien l'état dans le quel le livre m'avait plongée 
 C'est sombre, comme par une nuit sans lune, et pourtant quelque chose se trame et s'incarne sous nos yeux, sans qu'on puisse soulever un coin du voile...
 
 
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 photos issus du site de l'opéra de Paris : www.operadeparis.fr

 
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