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  • : Un jour, une œuvre
  • : Créé en 2006, ce blog rédigé par Valérie Beck autrefois consacré à la danse et à ma compagnie se diversifie davantage.
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Noureev

 

Danser, telle la phalène sous la lune, le pinceau du calligraphe, ou l'atome dans l'infini 

                                              

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14 novembre 2007 3 14 /11 /novembre /2007 13:10

Médée Angelin Preljocaj, une oeuvre qui hante

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J’aime quand les œuvres me hantent…quand elles habitent mon esprit à mon insu ; quand elles vivent en moi, comme des passagers clandestins, qui parfois, montrent amicalement leur visage… ces oeuvres là me nourrissent aussi sûrement que l’air, l’eau, le soleil…
 La Guerre et la paix de Tolstoi, le film éponyme de Bondartchouk, Giselle, ou Hurlevent, les Heures, de Cunnigham font partie de ces œuvres qui se sont implantées en moi, et qui surgissent d’une manière inattendue, dans mes pensées. Le songe de Médée de Preljocaj vient de les rejoindre…. 

Un drame épuré

D’une sobriété surprenante, cette œuvre n’en est pas moins d’une intensité dramatique presque insoutenable… Il s’agit bien d’un « songe », et pas du drame « Médée » comme l’a conçu Euripide… et cette nuance est d’importance car le spectateur peut faire plusieurs lectures de ce ballet, tout comme les danseurs le peuvent aussi en l’interprétant. 
Tout le drame se resserre autour de cinq scènes dansées par trois personnages et deux enfants. En quarante minutes, tout est joué : Prejlocaj n’a pas dilué son propos dans une œuvre où le corps de ballet aurait par exemple joué le rôle du chœur, comme dans les drames antiques, offrant alors un ballet de facture plus classique en deux actes. 
Tout va vers l’essentiel, vers l’épure : les décors, où les sceaux suspendus, peints sur les rideaux transparents ou sur le fond de la scène où encore déposés au sol délimitent l’espace et crée de la poésie là où on ne l’attend pas : Médée verse du lait dans les sceaux et les enfants viennent laper ce lait comme des petits chats. Plus tard, comme dans la vision hallucinée de Wozzeck, le lait sera sang, folie, ou eau qui ne pourra faire disparaître les traces du crime. La lumière, qui sculpte les corps à l’antique, est travaillée avec subtilité dans des tons bleus-dorés.


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Liberté, interprétation, lecture

Les costumes, noir, rouge, argent ou doré, longs, fluides, portés pour l’entrée de Médée puis de Jason conviennent à un roi et sa reine. Le long manteau sert de cape aux enfants, de cachette, de couverture, de sépulture… la robe sera rejetée avec la trahison de Jason : Médée n’est plus une femme. Pour son entrée, Créüse porte une robe courte et très fluide qui dénude son dos et ses épaules… 

Ce qui donne sa grande force au ballet, c’est la possibilité qu’ont les interprètes de colorer, chacun avec sa sensibilité propre, le propos du chorégraphe : Ainsi, en fonction des danseurs et des danseuses – Médée, Jason, Creüse – la mère infanticide apparaît soit comme une femme implacable, qui a tout prévu d’avance par vengeance, autrement dit comme un monstre, soit comme une femme qui perd la raison lorsqu’elle voit la trahison de Jason, soit comme une femme ivre de douleur qui se punit elle-même et se tue en tuant ses enfants… Les rapports entre Médée-Jason-Créuse changent eux aussi ; Médée face à Jason peut être hiératique, folle d’amour, mère avant tout, ou amante, forte face à Créuse sa rivale ou ne faisant pas le poids… Il suffit de voir les interprêtes (Gillot, Letestu, Moussin, Cozette pour Médée ou Hilaire, Romoli, Bullion pour Jason, et encore Renavand, Zusperreguy, Abbagnato pour Créuse) pour comprendre que le drame qui va se jouer n’est pas mis en branle par les mêmes motifs psychologiques… A chaque fois une lecture est possible. 
Là se révèle la grandeur du chorégraphe qui peut laisser cette latitude et aux danseurs et aux spectateurs sans que son œuvre ne s’en trouve réduite ou amoindrie. Elle est mise en espace par la musique de Mauro Lanza qui avec un grand sens de l’économie créée des séquences entières, pleines de poésie où le temps se suspend, ou pleines d’inquiétude avec ses notes tenues où couve une menace. Lorsque la fureur éclate, attendue, les instruments explosent et le drame s’achève... 
non, le drame ne s'achève pas, parce que après l'infanticide, il y a le vide...

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Une oeuvre humaine

Ces œuvres là hantent longtemps parce que l’humain y a sa place tout entière… derrière la tragédie, derrière les racines grecques du drame se cachent des êtres  humains, fragiles, dépassés par leurs actes car manipulés par les Dieux  ( pour les auteurs Grecs)  ou leur Inconscient, ce qui au fond revient au même. Les shivaïstes ne disent-ils pas que les Dieux se nourrissent des Humains, comme les Humains se nourrissent des animaux et des plantes, qui elles-mêmes, etc… ? 

L’économie de moyens ( peu de danseurs, de costumes, de décors) ne retire rien à la force, aux émotions, qui traversent toute l’œuvre : amour maternel, innocence, amour, désir, séduction, plaisir, jalousie, inquiétude, colère, haine, rivalité, vengeance, folie, meurtre, douleur, regret, vide… une multitude d’émotions déferlent sur les trois protagonistes et sur les spectateurs qui redoutent et craignent le dénouement : bien qu’inéluctable, sera peut être évité ce soir ? La aussi réside la force d’une œuvre : susciter chez le spectateur l’espoir que   le dénouement ne sera pas celui qui est prévu... il y a peut être de l’espoir,  le pire ne sera  peut être pas commis ?
 Médée est une œuvre à voir et à revoir, car dans son langage contemporain, elle cache un drame éternel. Avec intelligence, Preljocaj s’est éloigné de son original grec et la transpose presque hors du temps. Mais si on lit l’original grec, on a conscience que les héros sont finalement proches de nous… Et offrent la possibilité d’une relecture sans changer fondamentalement les données. 


Songe...

C’est un songe : on y dort au début (les enfants) on s’y endort (Médée et ses enfants)…on s’y éveille… mais s’y éveille t’on à la réalité ? N’est ce pas plutôt le songe qui s’éveille ? Et si ce qui apparaissait sur la scène n’était que le produit d’un songe ? Comme dans les armes secrètes de Cortazar, qui rêve quoi ? Qui rêve qui ? Où est la réalité ?

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 un deuxième et court article est en préparation sur Médée.

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22 septembre 2007 6 22 /09 /septembre /2007 09:35

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Et bien voilà, hier, j'ai revu ce chef d'oeuvre de Belarbi!
Que dire de plus que ce que j'ai écrit il y a deux ans?
je ne reviendrai pas sur le ballet lui même et sa narration, si réussie, plutôt sur les moments qui m'ont marquée hier....

Les artistes ont donné une vision du ballet absolue, magistrale, d'une époustoufflante intensité.
L'intensité est d'ailleurs la marque de ce ballet où sont brassées des émotions violentes, rageuses, entières...
J'étais au deuxième rang, juste au milieu, donc très près des artistes
Certes, lorsque l'on est si près, on n'a pas une vision d'ensemble des choses, mais on sent toute une atmosphère...
Le ballet en lui même est magnifiquement conçu et Belarbi a su tirer de l'oeuvre de Bronté sa férocité, son aprêté, ses passions. Deux actes parfaitement équilibrés pour jouer un drame d'une grande force.
Hurlevent, ce sont les passions brutes, sans artifice, où la violence le dispute à la haine, et où l'amour triomphe quand même... avec les retrouvailles de Cathy/ Heathcliff dans la mort, mais aussi avec le couple des enfants que  Cathy et   Heathcliff ont eu de leur côté.

Nicolas Leriche campe un Heathcliff nourri de haine et dévoré de passion pour Cathy : sa danse, sublime, a acquis une force, une densité, une virtuosité absolue! Je l'ai vu danser des dizaines de fois, mais j'ai toujours l'impression que c'est la première tant cet artiste m'étonne, me bouleverse, me cloue sur mon siège par sa force, sa puissance, l'élévation de ses sauts, l'intensité de ses gestes. Le tout servi par une immense sensibilité d'artiste...  Un vrai cyclone... où transparait un personnage odieux, mais déchirant quand même : il décline mille et une nuances de haine, de violence, de vengeance... mais de souffrance aussi par son amour rejeté. Totalement habité d'un bout à l'autre du ballet, il forme avec Gillot/ Cathy un couple mythique, pour lequel on souffre de les voir se faire tant de mal...
Marie Agnès Gillot elle aussi a une danse toute en nuances, et l'on comprend parfaitement tout ce qu'elle ressent : sa technique magnifique est au service de son personnage d'un bout à l'autre du ballet,  et de tout ce que Cathy a à nous dire : pétrie de contradictions, Cathy ne peut pas choisir mais seulement souffrir... elle est crucifiée entre son amour pour Heathcliff mais qui n'est q'un garçon de ferme, et pour Linton qu'elle n'aime pas comme elle aime Heathcliff, bien qu'elle ait une certaine tendresse pour lui, mais qui lui offre la vie dont elle a toujours rêvé... Gillot passe par l'ingénuité, la candeur, la femme qui se révèle, la souffrance... sitôt qu'elle a quitté la lande et Heathcliff, elle est tourmentée, et le restera fantôme, jusqu'à la mort d'Heathcliff qui lui apporte enfin la paix...
La voir danser est un bonheur total, car ses mouvements sont fluides, amples et précis, et elle a cette capacité rare a emplir à elle seule tout le plateau de Garnier; une fois qu'on la voit, on ne peut plus la quitter des yeux...
J'ai toujours autant de plaisir à voiir Heathcliff et Cathy dans la Lande, puis la métamorphose de Cathy, qui de petite sauvageonne ingénue, devient une femme du monde, tandis que  Heathcliff, dévoré de chagrin, danse avec la robe que Cathy portait dans les bruyères...

j'ai toujours autant de plaisir à suivre toutes les étapes de ce drame; à voir Joseph allumer et éteindre les feux, à voir les gardes du corps telles des ombres de l'au delà, danser dans leur grand manteau, comme un vol de corbeaux sur la plaine

J'ai toujours la même fascination pour chaque tableau qui s'enchaine l'un à l'autre, sans brisure, sans que le spectateur ne se perde dans des détails...

Le corps de ballet n'est pas bavard mais participe aussi de la narration du ballet. Hier, Charline Giezendanner avait l'esprit de la danse en elle : elle irradiait!
Toutes les autres danseuses formaient un bel ensemble, mais chez Charline, le mouvement semblait plus beau, plus large, plus généreux, plus nourri, plus accompli, plus danser...
Alice Renavand était renversante de beauté et de séduction chez les Linton... 

Le corps de ballet me rappelle un peu le choeur grec antique, qui commente : les esprits de la terre, comme j'appelle les paysans du premier acte, les gardes du coprs, ou encore les gardes d'esprit apporte au ballet une dimension dramatique intense
Par exemple, la danse des paysans n'est pas un divertissement : il participe à l'apreté générale du ballet: la danse est sans fioriture, les costumes sont couleur de terre, les chaussures résonnent lourdement sur le sol, les mouvements sont amples, bourrés d'énergie mais ne recherchent pas  à être beau

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Chez les Linton, pas non plus de danse décorative : le bal est empesé, figé dans ds ports de bras couronne qui ne visent pas à être jolis mais à dire comme ce monde est soumis à ses propres régles et conventions sociales... pas de liberté de ce côté là, mais des règles...
Dans ce context, la danse d'Isabelle qui quémande l'amour de Heathcliff pour lequel elle a un mélange d'amour, de compassion, et de besion de se faire mal, prend tout son sens.

Certes, j'ai préféré largement le rôle de Linton dansé par Karl Paquette que par JG Bart, qui possède une technique d'une précision hallucinante, mais qui, de mon point de vue, relègue l'émotion au second plan, mais JG Bart met bien en lumière le monde qui le sépare d'Hethcliff...

En revanche, Nolween Daniel m'a énormément convaincue dans le rôle masochiste d'Isabelle.
Je garde une petite préférence pour  Eléonora Abbagnato qui  a une fragilité supplémentaire, mais Daniel a une belle dimension artistique, l'incarnation de son personnage est totale et son duo avec Heathcliff est complètement terrifiant...

Le Hindley de Stéphane Bullion n'a pas l'apreté d'un Romolli, mais sa relation à Heathcliff est d'une grande lisibilité : leurs duos sont impressionnants là encore! au début, il domine puis peu à peu, il choit...

Aurélia Bellet campe une Nelly pleine de bon sens terrien, la seule à rester droite au milieu de ce tourbillon d'émotion.... c'est un peu un gouvernail dans la tempête, qui montre le chemin, même si personne ne la suit...

Sans passer en revue chaque scène qui a elle seule mérite un article, je dirai que ce que j'aime dans Hurlevent, c'est qu'il plonge ses racines dans les ballets qui l'ont précédé tout en renouvelant le genre
Ainsi, le pas de trois de Cathy/ Heathcliff/hindley m'a t'il évoqué un court instant Rothbart, Odile, et Siegfried...
la même poésie, la même magie mais dans un autre langage
J'ai encore la vision du fragile cygne blanc entre le magicien et le fragile prince qui a si peu de prise sur le réel .... Cathy elle aussi se retrouve entre Heathcliff, dominé par ses passions, et le fragile Linton...

J'ai déjà écrit comme ce ballet me rappelle Giselle...
Mais on peut aussi voir des réminiscences des oeuvres de Mats Ek
Ce ne sont pas des citations, ni de la copie!!!
Non, c'est une filiation : Belarbi s'est nourri largement de tous les ballets qu'il a dansés, vus, et à présent, son oeuvre, originale, intelligente, sensible, emmène un peu plus loin dans la narration la tradition du ballet...

C'est toujours difficile de revenir à la réalité après avoir vu une oeuvre comme celle là: on est partagé entre deux états, celui d'en parler pour mettre à jour tout ce qu'on a ressenti, celui de se taire, pour garder tout précieusement intact au fond de soi, que ça ne s'échappe pas!
 


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Bref, j'ai deux espoirs à présent : 

un, que Belarbi nous crée vite un autre chef d'oeuvre!!!!
deux, qu'il y ait une captation digne de ce nom de cette oeuvre magnifique!
Bien sûr, je vous tiens au courant!
 
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19 août 2007 7 19 /08 /août /2007 08:54

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L'opéra de Paris reprend pour la troisième saison  l'oeuvre de Kader Belarbi, Hurlevent, d'après l'oeuvre d'Emilie Bronté. Ce ballet est un chef d'oeuvre! L'une des plus belles créations dans la tradition du ballet, mais avec un langage chorégraphique très personnel qui assure le lien entre le langage classique et une esthétique plus contemporaine.
 
On y retrouve, d'une façon stylisée, ce qui fait la force du roman : les passions des personnages. Ainsi,  l'amour, la jalousie,  l'aspiration à la richesse, la vengeance animent-ils avec violence Cathy, Heathcliff, Hindley, les éléments y jouent aussi un rôle important, comme dans les peintures romantiques de C Friedrich, par exemple : le vent, la terre, l'air, la lumière, la solitude de la lande, la mort, les tourments, l'hostilité des paysages...

L'oeuvre n'est pas sans rappeler Giselle, avec son premier tableau " esprit de la terre"qui décrit la lande, le monde des paysans, les amours enfantines de Cathy et Heathcliff,,tandis que le deuxième  évoque" esprit de l'air" et celui des esprits qui hantent la lande
 
J'ignore si Belarbi s'est inspiré aussi du magnifique Soeurs Bronté de Techiné, et de l'inoubliable " haut des hurlevents" avec L Olivier et M Oberon, mais la même ambiance est là...
Les solos, les duos, les ensemble renouvellent complètement le langage chorégraphique
 

Bref, cette oeuvre profondément inspirée nous livre une passion hors du temps, qui hante longtemps...

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le livre de Bronté, Merle Obéron et L Olivier.... Nicolas Leriche est vêtu à l'identique dans le ballet

en lien, une critique que j'avais publié il y a deux ans.
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21 mars 2007 3 21 /03 /mars /2007 09:46

 j'ai découvert Signes de Carolyn Carlson en 2004 à l'opéra Bastille : véritable engouement pour ce ballet!a peine étais je sortie de la salle de spectacle  que déjà je voulais   retourner le voir!

Voici deux bonnes nouvelles!

La première : cette chorégraphie est sortie en dvd, et je me suis précipitée pour l'acheter, malgré son prix!

La seconde : ce ballet sera redonné la saison prochaine à Bastille : j'y retourne!

Certes, une fois de plus, avec le DVD, on perd 50 pour 100 de ce que l'on peut ressentir dans une salle de spectacle, mais bon... c'est mieux que rien, n'est ce pas???


je ferai un article sur Carolyn Carlson prochainement. Dans ce travail, on voit la filiation qu'il y a entre elle et Alvin Nikolais ainsi que Martha Graham ( rien que par les costumes!!!)

C'est une oeuvre complète que ce Signes. La peinture est le point de départ. A partir de ses propres toiles,   Olivier Debré réalise des décors  à grande échelle.  Il va aussi, - et c'est logique- concevoir les costumes qui sont d'ailleurs d'une immense poésie.

 Carolyn Carlson, elle, va se nourrir de l'énergie de la peinture pour mettre en mouvement les corps. Quand à la musique, elle est écrite sur mesure par René Aubry qui collabore avec Carolyn Carlson depuis très longtemps.

Le résultat est un ensemble plein de vie, de couleur, d'énergie, de gaite, de fantaisie, le tout d'une grande simplicité et lisibilité comme Carslon seule en a le secret...

Ainsi, même avant d'acheter le DVd et de revoir Signes, j'avais en mémore les petits pieds des danseuses qui barbotent danas l'eau, kader Belarbi et son cannotier, dans la belle lumière de l'été, les énigmatiques moines de la baltique en rouge et noir, la sculpturale M A Gillot, qui fut d'ailleurs nommée étoile sur ce ballet, les silhouettes comme des flammes des danseuses en robe moulante ( clin d'oeil à Graham) le yin et le yang dansant sur la scène...

bref, il me restait en mémoire des sons, des couleurs, de la lumière, de la vie, de la gaité... un spectacle vivant, cohérent, véritable hymne aux vibrations que sont le son, la couleur, le mouvement...

Signes est un ballet sans " message" mais profondément spirituel car il se nourrit à la source même de la vie : l'énergie, c'est dont parle aussi bien les Chinois ( le Chi) que les Indiens...

Il y a aussi tout ce travail fait sur la couleur, sur la lumière : on passe de l'ombre à la mi ombre, au plein soleil, couleurs lunaires cèdent la place aux couleurs solaires, la scène rouge sang, devient bleue pale, et puis les décors sont mobiles, ils bougent, ils sculptent l'espace agrandissant ou rétrécissant l'espace scénique.

La musique, simple, un peu facile parfois, est là pour donner le diapason : comme une harmonique qui amplifie le travail de couleur et de mouvement...

bref, un spectacle d'art total, envoutant, grisant, dont on ressort le corps léger, l'âme légère, avec une envie absolue de couleur, et un amour immodéré pour la lumière... sans elle, on ne verrait rien...

Carlson, que j'ai souvent vue au théâtre de la ville, dans des oeuvres qui m'ont tour à tour plu ou déplu,  a réalisé pour l'opéra de ballet l'une de ses plus vivantes chorégraphies...

C'est Pietragalla qui avait créé le rôle féminin

Quand à Patrice Besombes, il a réalisé les lumières, et c'est un travail souvent peu salué qui est vraiment fabuleux sur cette oeuvre.


Signes, édité chez Bel Air.

actuellement, C Carlson dirige le centre chorégraphique de Roubaix :

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25 février 2007 7 25 /02 /février /2007 15:32

  La fille du Pharaon est un des ballets exotiques de Marius Petipa, grand chorégraphe marseillais, fraichement débarqué à Saint Pétersbourg... il a déjà à son actif plusieurs chorégraphies, réglées pour la plupart à Bordeau ou en Espagne sur des thèmes exotiques ( l'Espagne était déjà à la mode, comme en témoignage, entre autre, le voyage en Espagne de T Gautier, ) et il avait déjà travaillé sur Paquita dans la ville russe.

Ce ballet eut un succès retentissant, et au fil des chorégraphies, Petipa va exploiter cette veine brillante, qui transforme un ballet en un spectacle d'art total, d'une certaine manière : décors, costumes, danseurs, musiques, pas, accessoires, mise en scène, tout est réglé avec une minutie jamais égalée au paravant: des accessoires sont utilisés : voiles, tambourins, qui rythment certaines danses, des animaux font leur apparition : singe, lion, cheval, dromadaire, serpent sacré d'Isis... et puis, il y a les grands défilés qui font beaucoup d'effet... le tout s'achevant en apothéose totale, d'après les dires de l'époque...

 


 

 

Car l'Egypte est à la mode - Aïda, une nuit de Cléopatre en sont d'autres exemples. La scénographie du ballet est tirée du " roman de la momie" de T Gautier : elle relate les amours contrariées d'Aspicia et de Taor, qui en fait, apparaissent en rêve à un lord anglais, parti voyager en Egypte, comme il se doit à l'époque... ce roman de la momie est publié en 1856, la même année que Salambô de Flaubert.

Mais la scénographie n'est qu'un prétexte à des tableaux d'une magnificence exaltante : les décors recréent les fastes de l'architecture égyptienne, telle qu'on commence à la redécouvrir ( Mariette a mis à jour le site de Memphis, quelques années plus tôt) et Petipa, pour les costumes, s'inspire  de fresques vues dans des musées... le soucis de l'exactitude historique n'est pas la priorité, mais plutôt la grandeur de l'ensemble : l'oeuvre est ponctuée par plusieurs " défilés" qui ont beaucoup de succès! L'idée est toute simple : faire défiler sur un rythme de marches militaires, des lignes de danseurs richement costumés pour créer une impression de grandeur et de dépaysement historique et géographique :

 

 

Ce ballet inspirera en partie Fokine pour ses "nuits egyptiennes" de 1907 et pour " Une nuit d'Egypte" en 1908... la sensibilité a changé, mais cet "hommage" met ces oeuvres dans la continuité de la ligne exotique tant aimée encore en ce début de siècle  (il n'est qu'à penser à Ruth Saint Denis, par exemple)

 


 

En 1928, le ballet est donné une dernière fois. Il disparaitra pendant la période bolchévique et ne sera pas repris... C'est Pierre Lacotte qui s'est employé à restituer la chorégraphie de Petipa, en partie perdue, dans son style originel...   il a aussi retrouvé des esquisses de costumes, mais seulement trois costumes intacts... Sa reconstitution, minutieuse, pour le théâtre du Bolchoi avec la sublime Zakharova a fait l'objet d'une captation DVD, de très belle qualité!

Il est étonnant de voir les dignitaires des palais egyptiens danser en dehors, et fermer leurs cinquièmes... mais il en était ainsi à l'époque : le ballet était avant tout une porte ouverte sur un rêve, où tout était mis en oeuvre pour que la perfection soit atteinte... 

 

 

 


 

 

Cette fille du Pharaon ne manque pas de charme. Le ballet annonce déjà la Bayadère, qui reprendra bien des éléments qui avait marqué le précédent ballet... la musique de Cesare Pugni n'est pas aussi désagréable que celle de la Bayadère, même si elle n'a pas la poésie d'un  A Adam... suivra dans le même esprit Raymonda... le Corsaire avait été l'une des premières chorégraphies de Petitpas à Saint Petersbourg dans cet esprit, mais n'avait pas atteint cette splendeur...

 

 

 

J'aurai l'occasion de reparler de Bayadère, du Corsaire et de Paquita... pour l'heure, j'ai déjà écrit quelques petites pages sur Raymonda, que j'aime par dessus tout... peut être parce que c'est le premier ballet de Noureev que j'ai vu sur scène...

Noureev avait d'ailleurs dit à Pierre Lacotte qu'il serait bien de remonter La fille du Pharaon, mais le projet en était resté à l'état de simple désir...

Finalement, Lacotte a pu faire avec le Bolchoi ce fabuleux travail de reconstitution.

 

 

 A lire sur ce blog :  Raymonda

Dvd : la fille du Pharaon édité par Bel air, avec Zakharova et filim.

 

En savoir plus sur Petipa  ( site de C Schemm)

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26 juin 2006 1 26 /06 /juin /2006 19:35

 Pour une fois, je vais laisser la chorégraphe elle même parler. Ce texte est extrait d'un ouvrage fantastique qui s'intitule " Mémoire de danse" par Martha Graham. J'aurai l'occasion de vous en parler souvent, mais aujourd'hui, je voulais vous présenter Lamentation par la voix de Martha.


 

Lamentation, ma danse de 1930, est un solo ( sur une pièce pour piano de Zoltan Kadoly, compositeur hongrois du XXème) dans lequel je suis vêtue d'un long tube de tissu pour suggérer la tragédie qui hante le corps, cette capapcité que nous avons de nous dilater à l'intérieur de notre propre enveloppe, de percevoir et de mettre à l'épreuve les contours et les limites de l'universelle douleur. J'étais en coulisse, en train de me déshabiller et de me démaquiller, lorsqu'on frappa à la pore. Une femme entra dans ma loge. Elle avait manifestement beaucoup pleuré et elle me dit : " Vous ne sauez jamais ce que vous avez fait pour moi ce soir. Merci!"

Elle partit avnt que j'aie pu lui demander son nom. J'appris par la suite qu'elle avait, peu de temps auparavant, perdu son fils de neuf ans, tué sous ses yeux par un camion. Elle était incapable de pleurer. Quoiqu'on tente pour elle, elle était demeurée incapable de pleurer jusqu'au moment où elle avait vu Lamentation. Ce que j'appris ce soir là, c'est qu'il y a toujours une personne dans le public à qui on parle.  Une. Tout ce que je demande, c'est une réaction, positive ou négative.

Une autre fois, dans le Sud, Lamentation suscita une réaction tout à fait différente. Je dansais sur une petite scène dans un club féminin très select. Une vieille dame se leva en grommelant et descendit vers moi la travée de l'auditorium. Elle posa les mains sur la scène et me regarda. Puis elle se détourna et sortit. Ce fut tout... mais je terminais la danse."

 


 


Juste pour dire que cette chorégraphie date de 1930....

vraiment étonnante cette Martha, surtout quand on regarde ses débuts à la Denishawn : la danse pour Ted Shawn et Ruth Saint Denis était décorative, exotique, et mystique... Graham a travaillé seule et sans relâche pour faire naître Sa danse.

 

De plus cette femme a quelque chose en commun avec Rachel Brice : comme elle, elle est née à San Francisco!


A venir : Martha Graham et la modern dance

              Mémoire de danse et commentaire

             Portrait

            Quelques oeuvres chorégraphiques inoubliables...


Savez vous que ?

une de ses dernières élèves fut Madonna, qui d'après Martha Graham avait une personnalité affirmée

que son studio de danse fut loué par Woody Allen pour un de ses films.Martha  trouva le studio si terne qu'elle le fit repeindre...

et enfin, que pour elle, une femme doit avant tout danser... avec son vagin. 

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25 juin 2006 7 25 /06 /juin /2006 19:07

  Qui est t'elle?

C'est Marie Taglioni!

A t'elle un rapport avec Giselle?

Oui, indirectement... Marie Taglioni est la première danseuse a être montée sur pointes...on n'imagine pas aujourd'hui de danseuses classiques sans leurs pointes, ces chaussons sur lesquels elles se hissent en équilibre, et qui rendent la silhouette tellement aérienne!

Cette invention date du début du romantisme en France. 1831 :   création de la Sylphide, ballet qui annonce Giselle à sa manière... La Sylphide raconte l'histoire au féminin de Trilby, petit esprit malicieux qui vivait dans une demeure écossaise et était secrètement amoureux de la maîtresse de maison. Nodier en a un fait une nouvelle très romantique, qui s'achève par la mort du malheureux et inoffensif Trilby...

La Sylphide est sa " soeur" et est à l'origine du premier ballet où apparaissent tutu long, comme sur la photo,  tulle, tarlatane, corsage, fleurs, et couronnes sur la tête. Voyez comme l'image de l'époque rend totalement immatérielle la danseuse : ses pieds sont minuscules, elle semble voler, être totalement à l'aise dans l'air... son rapport à la Terre, à la matière, est inexistant. Elle incarne la femme qui ne peut exister... un être idéal, doté de petites ailes fragiles et graciles qui lui permettent de se mouvoir, invisibles, autour des vivants qu'elle taquine gentiment...

Giselle utilisera tous ses éléments, pointes, tutus, ailes, mais en plus le voile : voilà, la panoplie de la robe de mariée voit le jour entre 1830 et 1840. Ce costume est porté par des êtres irréelles qui finissent tragiquement... curieuse coïncidence qui me fait mieux comprendre pourquoi,  depuis l'enfance, je me suis toujours dit que si je me mariais, ce cerait en robe rouge à taffetas, comme les danseuses espagnoles!!!

Je veux de la passion, pas de la virginité qui finit dans la tombe!!!!

 


 

Mais revenons à nos esprits!!!

A noter aussi que la coiffure de Giselle ne sera pas la même : chignon relevé en frisettes autour du front, pour la Sylphide, dégageant la nuque et qui donne un côté espiègle, gai, bandeau plat autour du visage et chignon bas pour Giselle : ces détails ont leur importance : on est passé du léger, du gracile, au grave, au sérieux, au drame... même la coiffure recouverte du voile, celui de la virginité, celui du mystère, celui des fantômes... qui sera celui de la mariée... apporte non du rêve, mais de la douleur. Les manches tombent sur les épaules et flottent, tout va vers le bas...

C'est un prodige qu'un simple costume, à lui seul, exprime déjà tant de choses : le costume de la Sylphide, avec ses fleurs bleues, le collier de perles autour du cou, est gracieux, séduisant;  la Sylphide est vivante, mais désincarnée. ( Voir aussi photo plus bas)

 Le voile, les ailes basses, les manches tombantes de Giselle expriment une douleur, un deuil consommé... Giselle est une morte.... encore amoureuse, comme dans la nouvelle de Hoffmann...

Quand aux petites ailes, qui donnent une dimension angélique à la Sylphide ( voir la photo de Marie Taglioni) elles n'ont plus du tout la même dimension dans Giselle ( voir ci dessus Markarova en 1944) : elles ne sont plus accrochées droites et bleues, assez haut sur le tutu, comme des ailes de paon. D'ailleurs, lorsque la Sylphide meurt, ce sont ses ailes qui tombent en premier, signifiant au petit être ailé sa fin proche. Elles les prend dans ses mains, comprend sa fin proche,  pleure  et nous avec...

 

Dans Giselle, les ailes ont un côté fantômatique, dramatique... elles sont là pour que les Willis s'envolent la nuit comme les phalènes et tourmetent les voyageurs égarés...

Les ailes sont blanches, diaphanes, mais elles sont aussi communes aux êtres démoniaques, chauves souris, diables ailés...  les willis  appartiennent en partie  à ce monde démoniaque des damnés éternels... leurs ailes ne sont plus celles des anges...

 

 Marie Taglioni sur pointes pour la première fois dans la Sylphide

Mais revenons aux pointes : on n'imagine pas aujourd'hui quelle révolution se fut que de se hisser dessus. Les pointes n'avaient pas la solidité d'aujourd'hui et obligeait la danseuse à puiser toute sa force dans ses pieds et ses mollets...

L'attitude de Markarova et de Marie Taglioni est la même ( regardez les deux photos)  : petite arabesque basse sur pointe. Mais vous observez que  la pose de Marie est celle d'un être léger et joyeux, comme le sont les lutins : comment des pieds aussi minuscules peuvent porter une danseuse?

C'est qu'elle vit d'air et de vent... sans doute est ce la raison qui a fait que depuis toujours les danseuses classiques recherchent la minceur absolue : non seulement, c'est plus facile pour elles de monter sur pointes quand elles sont légères, mais de plus, elles ne blessent pas leur partenaire qui les porte, et qui est un critère de recrutement au sein des ballets; de plus, elles appartiennent du coup d'office au monde des êtres immatériels  et irréels!

Marie Taglioni explique qu'elle a travaillé d'arrache pied sous la férule de son père qui lui imposait deux heures d'exercices le matin, deux après le dejeuner et deux le soir, plus les spectacles. " Quand je n'en pouvais plus, dit elle, je comptais encore jusqu'à 100 pour gagner en endurance"

Effectivement, elle fit faire un bond énorme à la technique classique...

J'en reparlerai bientôt,en commentant un peu l'esthétique de la gestuelle de Giselle...

 


 

 A venir : Giselle et la gestuelle romantique.

               Les grandes interprètes

               Liste  de Dvd de Giselle a avoir à tout prix!!!

 


 

A lire aussi : Willis, conte gothique par shana

                       Le ballet romantique : Giselle ( 1)

                      Giselle, esthétique d'un ballet ( 2)

 L'envol des Willis la nuit au clair de lune : l'arabesque.

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22 juin 2006 4 22 /06 /juin /2006 10:13

 

La première fois que mon professeur d'allemand m'a lu le Roi des Aulnes de Goethe, j'ai failli m'évanouir. Oui, je sais, c'est risible! Et pourtant mon histoire est vraie. Ce conte m'a plongée dans quelque chose de profondément morbide, qui m'était parfaitement familier! La même année, je découvrais Giselle sur la scène du théâtre de ma ville avec la plus extraordinaire des interprêtes : Noella Pontois. Je mis plusieurs mois à m'en remettre là aussi.

Trente ans ont passé et rien n'a changé: la magie opère toujours de la même manière. Dès que j'entends les premières notes au piano du lied de Schubert, ou dès que je vois le cimetière où repose Giselle, je suis prise par une émotion très intense, de celles qui vous nouent la gorge et vous empêchent de parler. Et si les interprêtes sont à la hauteur, je finis profondément émue. Je n'aime pas me lever pendant l'entracte, j'ai l'impression de perdre Giselle.

Bref cette oeuvre est vissée à mon âme en quelques sortes : je connais la chorégraphie par coeur et pourrais la danser si j'avais la technique.

 


 

 

 

Bien sûr, on peut accorder la perénité de ce ballet au fait que plusieurs choses réussies ont été réunies : la musique, déjà, simple, limpide, avec des thèmes fluides et chantant,  accompagne un livret à la grande force dramatique : l'histoire banale et un peu " niaise" d'une paysanne aimée d'un prince déguisé, sombre tout à coup dans l'horreur, la folie et la mort à la fin de premier acte qui nous a régalé de baisers, de pas de vendangeurs, de chasses à cour... divertissements simples, sans prétention...

Au second acte, tout a basculé: les couleurs se sont enfuies... la vie a fait place à la mort et aux ombres. La forêt parée des couleurs d'automne ou passaient de chatoyants costumes de chasse au premier acte,  est à présent peuplée de follets blancs et de tombes noires dont les croix se dressent, maléfiques, près d'un étang où se mirent la lune et les étoiles...

Le second acte   blanc et noir met en scène des personnages fantômatiques; plus de vendangeurs, de paysans, de jupes fleuries.  Les willis, toutes de tulle blanc vêtues,  dessinent sur le sol des figures étranges et magiques. Leurs jupes   volent autour de leurs pieds qui effleurent le sol. Pleines de haine,  ces pauvres fantômes assoiffés de vie, d'amour, et de danse,  obéissent à leur reine quand Hilarion, un garde chasse qui a aussi aimé Giselle s'égare la nuit : elles le tuent sans aucune pitié:

 

 

 

Mais Albrecht, le prince, ne subira pas le même sort que Hilarion. Giselle le protégera car elle lui a pardonné, ce que ne peuvent faire ni Myrtha, ni les Willis, ses compagnes.

Myrtha a fait sortir Giselle de sa tombe. Elle lui brandit la myrthe, dont le symbole est : " n'oublie jamais". Elle  exhorte  Giselle à la haine, sans succès. Car  l'amour est plus fort que tout. Et c'est là, en partie, que le romantisme explose: dans la juxtaposition d'un sentiment amoureux qui ne peut se liberer que dans la mort, dans l'audelà, au royaume des êtres désincarnés... car l'amour, comme le bonheur, pour les Romantiques, n'est pas de ce monde, et la mort, ses mystères, ses secrets les fascinent tout autant que ses êtres fantômatiques qui reviennent parfois pour aimer ou tourmenter les vivants... Nerval était supersitieux, Gauthier, voyait des fantômes un peu partout, et Hugo faisait tourner les tables dans l'espoir de parler avec sa fille défunte... La réalité n'est pas loin de leurs écrits... Wagner portera ce thème de l'amour rédempteur dans tous ses opéras, dont un, contemporain de  Giselle : le Vaisseau Fantôme. Encore un fantôme, encore une femme aimante, encore la mort... la mort qui réunira aussi Tristan et Isold.

Ce second acte, dit acte blanc,  inspirera profondément, plus de trente ans plus, Marius Petipas, un danseur marseillais exilé en Russie. Il s'inspirera de cet acte blanc de Giselle pour créer le magique acte blanc des ombres de la Bayadère. Devant le succès, il crééra deux actes blancs dans le Lac des Cygnes, qui est l'écho russe du ballet français... 


 

 

 

 

 

Le rôle de la croix de la tombe de Gisèle n'est pas anondin. La foi est là, pas forcément une fois chrétienne fidèle à l'Eglise d'alors, mais une foi pleine de superstitions,  d'images de Croisades qu'on réinvente  (Delacroix), une foi, où, s'il n'est pas de rédemption possible, l'âme brûlera éternellement en enfer, où deviendra la proie de sorcières qui battent le sabbath ( Berlioz, Hugo)

Là, sous la croix, Albrecht est protégé et la Reine des Willis ne pourra rien contre lui. Lorsque l'aube blanchira enfin d'une pâle lueur le ciel entre les arbres, les Willis regagneront leurs tombes, Giselle et Myrtha la leur. Il ne restera dans les mains d'Albrecht que des lys blancs, déposés par Giselle...

A-t-il rêvé? Il ne le saura jamais...


A venir Carlotta, Théophile et Henrich!

La willis, conte gothique ( par Shana)


A lire sur ce blog :

Giselle : ( 1)

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20 juin 2006 2 20 /06 /juin /2006 21:46

Boléro, ah, Boléro!!!!

Je l'ai vu dansé hier par Nicolas Leriche!

Cette oeuvre me submerge toujours à tous les coups!

Musicalement parlant, déjà. Je ne m'en lasse pas, même lorsque c'est simplement un disque qui joue.

Mais en plus, lorsque l'on peut voir la chorégraphie! Alors là, c'est la magie pure du mouvement et de la musique en parfaite adéquation.

Bien sûr, parmi tous les interprêtes que j'ai vus, Jorge Donn ( photos) et sa démesure, son regard fou et ses gestes exaltés reste ma référence. La chevelure de Sylvie Guillem qui flamboyait au dessus de la table rouge,  ses longues jambes qui marquaient l'oscillation de la musique, son corps souple comme une liane mais avec une force dans sa danse toute masculine,   restent aussi complètement inoubliable!!!

 

 

Et puis hier Nicolas Leriche, plus en retrait par rapport aux deux danseurs cités - en tous cas le soir de la première, car je sais que sa danse va évoluer au fil des représentations - mais avec une intensité émotionnelle qui n'appartient qu'à lui. Plus de félinité, moins d'érotisme, peut être... mais un engagement d'une sincérité!

De toutes façons, on ne peut pas tricher avec Boléro... ! Si le danseur ne s'engage pas entièrement dans la danse, celle ci devient tout à coup banale, vidée de son sang, de sa sèven...

Hier, le corps de ballet a apporté la dose de sensualité, de force, d'orient qu'il fallait ! 

On dirait un rite : un danseur danse sur une table, et les gestes vont être répétés à l'infini par des garçons qui se lèvent par groupe de deux, de six, et qui amplifient le rythme obsédant de l'orchestre... le ballet procède par vague successive et la dernière vous engloutit tout entier!!! Vous, la musique, l'orchestre, les danseurs, tout le monde fond ensemble!!!

Simplement magique!

 


A lire aussi sur ce blog:

Béjart à Paris, présentation de Boléro :

 

J'aime Béjart

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17 juin 2006 6 17 /06 /juin /2006 09:17

  Giselle... De tous les ballets, c'est sûrement non seulement celui que je préfère, mais celui qui m'a donnée en tant que spectatrice, les émotions les plus fortes. J'ai déjà vu  deux générations de ballerines l'interpréter et je découvre la nouvelle génération : Laétitia Pujol, de l'opéra de Paris, se révèle être une interprête hors pair. J'espère la voir dans la prochaine saison qui sera donnée l'hiver 2006 à Garnier.


 

 

 

 Mais qu'est ce qu'un ballet romantique?

 

En fait, l'esthétique romantique qui prend sa source dans les pays anglo-saxons vers la fin du 18ème siècle est caractérisée par un profond mal de vivre qui fait rejeter la vie réelle pour explorer le monde du rêve, souvent peuplé de visions funèbres et macabres, tel ce rêve du peintre anglais Fussli.

 

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La génération romantique française de 1830 essaiera d'échapper à son " ici et maintenant" par tous les moyens : elle se lance  soit dans des voyages, ( tous sauf Chopin qui est très affaibli par sa tuberculose, la maladie des romantiques dont meurt aussi la Dame aux Camélias) soit par  une création hantée par des obsessions, ou par les deux (Delacroix, Gauthier, Nerval, Berlioz, Chopin, Hugo, Géricault )

La vision de la vie des romantiques, même lorsqu'elle  est parfois pleine d'humour (Gauthier) est  marquée   par la nostalgie, la mort , car pour ces jeunes gens ( ils ont entre 20 et 28 ans)  l'existence   ici bas ne peut être heureuse très longtemps. Aux joies succèdents forcément des peines ( Fantine).   De plus, l'irruption des choses irrationnelles et pas toujours bienveillantes inquiète  plus qu'elle ne rassure sur un monde des morts qui côtoie  les vivants d'une façon  effrayante ( Thème récurrent chez  Berlioz et Gauthier, il suffit de se souvenir de la descente aux Enfers du Faust de Berlio). Quand à la folie, elle n'est jamais très loin ( Nerval,   Gauthier, Géricault, Berlioz)

C'est en très " raccourci" certains ingrédients qui caractérisent les arts produits entre 1830 et 1848, date de deux révolutions qui ont secoué la jeune génération : l'une qui a lieu à Paris ( immortalisée par Hugo et ses Misérables) l'autre, plus européenne,   qui se soldera par échec. Car "l'Aigle " qui est mort en exil en 1821 à Sainte Hélène laisse derrière lui un souvenir inaltérable, et une aspiration profonde pour mettre à bas une fois pour toute les monarchies.

 


 

Qu'a à voir Giselle la-dedans?

 Nous y voilà : le livret est écrit par Gauthier. C'est son ami  Heine, le romantique allemand, qui lui a raconté la légende, d'origine slave : les jeunes filles qui aiment trop la danse meurent parfois. Elles deviennent des willis, des créatures de la nuit qui hantent les forêts. Et chaque nuit, sur l'ordre de leur reine, elles doivent danser jusqu'au lever du jour. Malheur au voyageur égaré. Elles le feront mourir!

Ce thème est proche de celui du roi des Aulnes de Goethe : Erkonig  capture la nuit dans les forêts des enfants et les emmène chez lui, dans son royaume de mort....

A partir de la légende des willis, ces fantômes qui dansent,   Gauthier écrit l'histoire d'un ballet : une jeune paysanne    aime passionnément la danse. Elle se croit aimée d'un jeune payson comme elle, qui n'est en fait qu'un  prince déguisé. Il    utilise ce subterfuge pour mieux l'abuser. Giselle découvre qui il est, ainsi que sa fiancée, une belle princesse qui, pour quelques heures,  s'est reposée dans sa cabane lors d'une chasse. Le chagrin, trop violent,la conduit à la folie puis à la mort. Comme elle aimait trop la danse, elle devient willis.

Poussé par le remord, le prince   se rend une nuit sur sa tombe. Il rencontre son fantôme blanc. Grâce au pardon de Giselle, pour qui l'amour est finalement plus fort que la mort, il ne mourra pas, car elle le protègera de ses terribles compagnes, bien décidées à  mettre à mort l'imprudent....

Le pardon et l'amour l'ont sauvé.

( A suivre!...)

 

 


 

 

A lire aussi : 

Gisèle (2) le ballet et son esthétique

Giselle ( 3) points de repère technique

La willis, conte gothique, nouvelle écrite par moi même!


A venir :

Dvd et vidéos -  

les grandes interprètes-

La saison de l'opéra de Paris.

gestuelle de Giselle

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