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  • : Un jour, une œuvre
  • : Créé en 2006, ce blog rédigé par Valérie Beck autrefois consacré à la danse et à ma compagnie se diversifie davantage.
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Noureev

 

Danser, telle la phalène sous la lune, le pinceau du calligraphe, ou l'atome dans l'infini 

                                              

marie-taglioni-in-zephire.jpg

2 novembre 2015 1 02 /11 /novembre /2015 08:20
Concours de promotion de l'opéra de Paris 2015

Concours  de l’opéra de Paris  les 3 et 6  novembre 2015


Première danseuse : 2 postes
Premier danseur : 1 poste
Sujet femme : 4 postes
Sujet homme : 1 poste
Coryphée femme : 5 postes
Coryphée homme : 2 postes

 

Il était question que le concours disparaisse et puis, non, il est toujours en place. Millepied, pas plus que Noureev, ne pourront donc le supprimer. Il semblerait que les danseurs eux-mêmes soient très attachés à ce concours qui leur permet, pour ceux qui le passent car ce n’est pas obligatoire, de se «  montrer » dans le bon sens du terme ; ils ont aussi l’impression qu’ainsi, tout le monde a ses chances, qu’il y a une certaine justice, car la place dépend du nombre de points obtenus ;  le jury composé de danseurs de l’opéra, du directeur de la danse, et d’autres danseurs issus d’autres compagnies doit en principe poser un regard neutre sur chacun ; mais comme toujours, l’objectivité absolue est-elle réelle ce jour ? D’autres enjeux, préférences, raisons obscures ne président elles pas au choix des nommés ? Souvent, les distributions de l'année, donnent un peu la température du concours; on voit qui est souvent distribué, qui ne l'est pas; tout cela a un petit côté cour du Roi Soleil, où l'on est dans les petits papiers de M.....  ou pas.... en ce sens, je comprends l'attachement au concours, une certaine justice semble être rétablie...

Pour le titre d'étoile, pas de concours bien sûr, mais une proposition au directeur de l'opéra de la part du directeur de la danse. Le nombre varie mais oscille toujours entre une quinzaine d'étoiles féminines et masculines, pour environ 120 danseurs du corps de ballet qui se divisent en quatre états : quadrille, le premier état, lorsque les élèves ont terminé leur classe, et se présentent au concours; un autre concours est ouvert aux élèves de toutes les écoles du monde. Puis vient le grade de coryphée, puis sujet, puis premier danseur. Beaucoup d'étoiles ne sont pas forcément passées par l'école de danse de l'opéra de Paris; on peut citer Platel, Ciaravola, Osta, Pagliero, Gilbert, issus d'autres écoles... cela signifie que l'école de danse n'est pas forcément une pépinière à étoiles... il y aurait beaucoup à dire la dessus mais ce sera pour une autre fois!

La sublime Hannah O Neil

Rude concours cette année encore pour les sujets filles ; deux places pour de nombreux talents dans les rangs des demoiselles

Mes goûts vont immanquablement à  Hannah O Neil, qui possède une technique d’acier, une belle présence, du charisme, une beauté radieuse sur scène ; elle est également très féminine. Cela fait du bien de voir une "femme" sur scène et il n'y en a pas tant que cela à l'opéra; la dernière en date était Ciaravola

Tout de suite après, la lumineuse Léonore Baulac qu’on suit aussi bien dans le classique que dans le contemporain. Comme Hannah, Léonore est une travailleuse acharnée… elle a été beaucoup distribuée depuis deux saisons.

Viendrait toujours en fonction de mes goûts personnels tout de suite après Charline Giezendanner ; certes, il y a peu d’espoir de la voir promue mais sa personnalité en scène est unique, et elle a réussi à me réveiller dans bien des ballets où je m’endormais, - comme la Source pour n’en citer qu’un -  par son engagement scénique et sa spiritualité. 

Ensuite, Sae Eun Park  que je vois depuis le Anne Teresa de Keersmaeker d’un tout autre œil ; la demoiselle dévoile peu en scène et pourtant, il suffit de la pousser un peu pour découvrir une toute autre artiste que celle qu’elle donne d’habitude à voir. Sa technique sûre, et elle a tout le potentiel d’une future étoile, si elle arrive à débrider sa personnalité.

Beaucoup espèrent que Héloise Bourdon «  montera » comme on dit à l’ONP, mais je lui préfére grandement les artistes que j’ai citées précédement. Tout comme Albisson, je ne suis pas touchée par cette danseuse à qui je trouve un  côté  très scolaire qui m’insupporte. 

 

Côté garçons, ce n’est pas mieux, il n’y a qu’un poste auquel peuvent prétendre bien du monde ! La compétition sera rude aussi.

J’ai été séduite cet hiver par le Siegfried de Bittencourt aux très belles lignes, mais j’ai personnellement une affection toute particulière pour Fabien Revillon qui m’a profondément marquée cet hiver, dans le Chant de la Terre.

Il y a toujours, comme pour Charline, les arguments «  contre » : l’âge, le fait de ne pas avoir véritablement l’étoffe d’une étoile, etc, etc…

                                                                                             Revillon et Bezard, Neumeier

certes;   l'autre argument est qu'un premier danseur est une étoile potentielle, et que nommer quelqu'un qui n'en a pas l'étoffe, c'est bloquer une place.... 

Mais comme Romoli autrefois, ou Paquette, je me rappelle de chaque prestation de Revillon quand d’autres s’effacent... son Lenski tout feu tout flamme et plein de candeur m’est profondément resté en mémoire, et pourtant cinq ou six ans ont passé et depuis, Revillon a renforcé une belle technique

 

Pour les sujets filles , ce sera moins pénible, il y a quatre postes

 

Il semblerait logique, au vue de ses qualités que Letizia Galloni passe sujet ; classique, contemporain, elle danse tout avec ardeur, passion, et une technique confirmée. Barbeau est une danseuse très charismatique, qu'on n'oublie jamais après l'avoir vue; elle aussi très à l’aise dans le classique et le contemporain ; Hilaire a une très belle présence en scène, et de belles lignes… 

 

Ci contre, Letizia Galloni

 

Et pour une numéro quatre, pourquoi pas Charlotte Ranson, qui, elle aussi, un peu    « poussée »  apporte une lumière en scène inégalable.

Mais cette place pourrait revenir à Viikinkoski, mise souvent en avant par la direction sans que je comprenne pourquoi. Elle n’avait pas particulièrement brillé dans le difficile pas de trois de Paquita !  Elle sera Gamzatti sur Bayadère cet hiver, ce qui me laisse dubitative...

 

Côté garçons, un seul poste de sujet, mais là, je ne les connais pas assez pour me prononcer ; Vigliotti brille particulièrement dans ce corps des coryphées, mais d’autres peuvent sans doute prétendre à la place.

 

Cinq postes de coryphées filles : de quoi avoir l’espoir de voir monter Lucie Mateci, une artiste que j’aime particulièrement ;  il y a aussi Amélie Joannidès, pétillante sur scène… pour les autres, je ne les connais pas non plus assez.

 

Deux postes de coryphées garçons : mais je ne peux absolument pas me prononcer !

 

Je n’assisterai pas au concours car je travaille, mais vous trouverez quand même sur ce blog un compte-rendu !

 

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1 novembre 2015 7 01 /11 /novembre /2015 10:15
Photo  Agathe Poupeney

Photo Agathe Poupeney

Cette soirée consacrée à Anne Teresa de Keersmaeker, dite ATK, commençait par Quatuor (Hilaire, Park, Bauchmon, Ranson), sur une musique de Bartok.

J’avais été mise en appétit par une petite vidéo postée sur le facebook de l’opéra de Paris qui montrait les quatre demoiselles de près dans le passage le plus réussi du Quatuor… je me suis fait avoir, mais je ne le regrette pas. Malgré l’insipidité du propos, les filles arrivent à tirer leur épingle du jeu ; Hilaire est sensuelle à souhait, Bauchman, puissamment lyrique, Ranson, diaphane et aussi précieuse qu’un Sèvre, et Sae Eun Park, c’est le feu qui couve sous la glace. Avec sa silhouette tellement fine, et sa grande pudeur et retenue quand elle danse, elle cache un tempérament incroyablement fougueux et puissant, comme un volcan en sommeil ; la voir dans ce répertoire était magique.

Contrairement à ce que j’ai lu à droite et à gauche, la construction est scolaire, poussive, et très peu inventive. Beaucoup trop longue aussi. ATK s’acharne à dire en 30 minutes ce qu’elle pourrait dire en 10 et comme si cela ne suffisait pas, il faut qu’elle rajoute ensuite d’une façon systématique des moments dansés dans le silence ! C’est tellement tendance depuis les années 1980 !

Donc entre chaque mouvement (et il y en a cinq) on a de longs passages dansés en silence, où on sent les filles sur le fil du rasoir, pas à l’aise, bref, des moments pénibles !

D’ailleurs l’œuvre commence dans le silence, puis, tour à tour, chaque fille va être meneuse dans le groupe, chacune sur un mouvement, en fonction de sa personnalité, et ensuite, - comme il y a cinq mouvements en tout – on redit la même chose mais toutes ensemble sur le cinquième.

La scène est sagement utilisée : en long, en large, en travers ! Comme c’est inventif !

Il faut donc beaucoup de patience au spectateur pour qu’il ne s’ennuye pas ferme pendant ces trente minutes de redites, où l’on voit une bande de gamines, sauter, marcher, courir, faire des galipettes, montrer sa culotte ( une fois, deux fois, trois fois, dix fois ! N’ayons pas peur de le refaire encore et encore !) ATK se croit sans doute investie d’un talent à  la Steeve Reich dont elle ne donne hélas qu’une pâle copie ; tout le monde n’a pas assez de génie pour tenir en haleine un auditeur ou un public avec un minimum de moyens, comme c’est le cas ici !

C’est sans doute grâce au charisme des danseuses que j’ai pu m’intéresser malgré tout à la vacuité de ce propos ; il faut dire que les demoiselles mènent le dernier mouvement tambour battant et que du coup, il se passe enfin quelque chose : on dirait que tout à coup, tout prend vie, devient vivant et authentique : il était temps, 28 minutes ont déjà passé !

Pour ne rien arranger, on sentait les danseuses quelques peu stressées, parfois crispées, et du coup, souvent peu synchrones.

A noter que les musiciens, dont le rôle est quand même ingrat, ont donné du relief et de la vivacité à ce quatuor de Bartók  (  E. Lacrouts, Gulot, Lenert, C Lacrouts)

Photo Opéra de Paris

Photo Opéra de Paris

Voilà qui ne mettait guère en appétit pour le morceau suivant, « Grosse Fugue », un quatuor de Beethoven. D’ailleurs, un public froid, qui n’applaudit pas, et fait des remarques à haute voix sur l’insipidité du propos, des éclairages et des costumes !

Après la cour de récréation, la sortie de bureau. Mais là, attention, on change  de  « niveau ».

Il faut tout le génie des danseurs de l’opéra pour rendre une fois encore intéressant une sempiternelle répétition de bonds et de roulades au sol, par des gens en costumes cravates qui finiront en tee shirt. Encore un peu on entendrait Zebda «  Tomber la chemiiiiise !! »

Pauvres genoux des danseurs !

Là non plus, pas une grande inventivité ; mais la vélocité, la fulgurance, la félinité, de Renavand,   Paquette,   Magnenet,   Bullion,   Chailley, Paul, Couvez et Gasse pour nous emporter dans ce petit «  délire » de fin de semaine où enfin on se lâche ! ça  « hip-hoperait «  presque à certains moments, mais sans la casquette à l’envers quand même ! C’est beaucoup plus «  smart »  -  ( Note : B M ne communique qu’en anglais sur son facebook, il faut bien que je m’y mette !)  La joie des danseurs  et leur plaisir sur scène est réellement communicatif et on partage leur petit grain de folie pendant ces trente minutes ; est-ce ce qu’a voulu ATK ? Si tel était son désir, alors on peut dire que c’est une vraie réussite ! La jeunesse et l’impétuosité de cette bande, menée tambour battant par l’irréelle Alice Renavand au visage, à la chevelure et à la silhouette parfaites, nous met dans un véritable état d’allégresse !

Après cette pièce, la moitié de la salle a gardé les bras croisés en guise d’applaudissement, et un bon dizième n’est pas revenu !

Et ils ont eu raison : le pire restait à venir !

Photo Opéra de Paris

Photo Opéra de Paris

Nous servir cette soupe de Verklarte Nacht, digne d’un roman de Barbara Cartland, sur la musique rendue complètement sirupeuse dans sa version pour orchestre du sextuor de Schoenberg avait de quoi faire prendre la danse en grippe !

Dès le début, ce ne sont que jérémiades de filles par terre – la Gillot s’en donne à cœur joie, et qu’est ce qu’elle le fait bien ! -  et de garçons qui les repoussent

Elles se jettent à leur cou, ils les repoussent, elles se roulent par terre…. Et cela pendant au moins 30 minutes !

J’avais déjà vu des pièces analogues au théâtre de la Ville dans les années 1990. Ces choses enfièvrées et échevelées ou tout le monde se secoue dans tous les sens dans une hystérie collective de mauvais goût.

Même commentaire que précédement, ces danseurs sont tellement extraordinaires qu’on est fasciné par eux, et non par ce qu’ils dansent ; on ne savait pas que les corps pouvaient se tordre jusqu’au bord de la rupture, ni les corps se tendre jusqu’à l’infini…. En revanche, les cheveux qui volent ici et là, on y a déjà eu droit il y a bien longtemps dans la terrible scène où la pauvre Mélisande se fait maltrairer par l’infâme Golaud !...

N’empêche, ces danseurs de l’opéra de Paris, ils sont fascinants, et c’est parce qu’ils le sont que je me suis décidée à aller voir ce programme ; quatre mois sans les voir sur scène – je ne suis pas allée à la soirée mixte du début de saison – cela crée un manque terrible, et il fallait bien que je les revoie pour que ce manque se comble un peu.

Et à la fin de cette histoire qui se passe dans la forêt, les violoncelles « vibratent » à en faire trembler le plafond de Chagall, - ils font même concurrence au métro qui fait trembler le sol -  le chef ( excellent Vello Pahn) décolle en fusée, tout le monde s’aime : alleluia !

Je suis ressortie de là en même disant qu’ATK n’a pas sa place à l’opéra de Paris ; la grandeur de la scène la dessert, le manque d’intimité aussi ; on est trop loin des danseurs, la salle est trop grande pour que cela serve son propos.

Après, il reste de fugitifs moments, où le visage bouleversant de Letizia Galloni se fige dans notre mémoire,  - on la verrait bien dans la compagnie d'Alvin Ailey, du temps de sa splendeur, car elle a la puissance, l'élégance, et ce délié du corps propre aux anciens danseurs de cette illustre troupe, telle J Jamison - où les blondeurs conjuguées de Paquette et Baulac se mêlent comme en un rêve, ou la puissance de MA Gillot, véritable Ovni de la danse, nous fige sur place… quelle incroyable danseuse…!

 

 

J'avais pris deux places, mais je ne sais pas encore si je retournerai voir ce programme dimanche prochain; si j'y retourne, je partirai à l'entracte, c'est sûr!

 

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23 septembre 2015 3 23 /09 /septembre /2015 10:10
Les adieux de Sylvie Guillem - Théâtre des champs-élysées 2015

Comme tous les artistes atypiques, Sylvie Guillem peut  susciter les sentiments les plus contradictoires. On peut être bouleversé par ses interprétations comme la trouver  exaspérante. Parfois, on a la curieuse impression d'assister à un monologue où la dame ne se préoccupe plus de savoir si le public l'écoute ou la suit, parce que seul ce qu'elle a à dire est important... peu importe que l'on adhère ou pas...

Le blog qui ne date que 2006  ne relate pas tous les rendez vous, réussis ou ratés, toujours attendus impatiemment mais où la rencontre n’a pas toujours eu lieu. Les pires, son film evidentia, que j’ai sifflé lorsqu’il fut donné à un entracte il y a longtemps, Carmen, Eonagata, par exemple, mais qui  côtoient les sublimes, tels Manon, Boléro, Appartement, La Luna, Sissi impératrice, Aurore, Odette/Odile, Raymonda, Somewhere, et tant d’autres… : au fond, dans ces rencontres, seul l’imprévisible est vraiment au rendez-vous !

Dimanche a été une rencontre parfaitement ratée. Pour se dire adieux, c’est un peu frustrant mais au fond, est-ce si important quand la mémoire regorge de moments uniques, de frémissements artistiques jamais égalés ?

 

Dire que je suis sortie exaspérée du Théâtre des Champs Elysées est un euphémisme.

Il y a déjà eu le problème de l’achat de la place, qu’il a fallu arracher au vol, et qui a coûté aussi chère a elle toute seule que mon abonnement pour voir quatre spectacles l’an prochain à l’ONP…

 

Puis il y a l’accueil dans le hall, par les stands bien dans l’air du temps, dont le but est sans doute que vous vous sentiez coupable si vous passez devant sans vous y arrêter.

 

Il y a ensuite le prix du programme auquel on renonce…. Tant pis ! On se rabattra à la maison sur les anciens…

 

techne, d'Akram Khan, les doigts comme ceux de Wigman dans la danse de la Sorcière

techne, d'Akram Khan, les doigts comme ceux de Wigman dans la danse de la Sorcière

Et puis le rideau se lève, et ça commence plutôt mal… la sono est mal réglée ; c’est trop fort ; pourtant, mes tympans ne sont plus tous neufs mais là, c’est pénible…

Techne  d’ Akram Khan reste pour moi l’œuvre qui symbolise le rendez-vous raté  de cette soirée. Ça aurait pu être un grand, fort, émouvant moment… mais ça a fait «  pouf » et puis plus rien.

En grec, techne désigne l’art à la fois comme outil et comme réalisation. Akram Khan a bien compris que Guillem a œuvré avec l’acharnement qu’on lui connaît,  toute sa vie, pour acquérir une liberté complète, totale de son corps, qui lui répond aux doigts et à l’œil… elle n’a jamais ménagé sa peine, elle a exigé de son corps plus qu’aucun autre ; certes, les dispositions étaient là, mais cette perfectionniste a toujours travaillé avec une exigence unique et sa capacité de travail est unique elle aussi. Donc le titre est merveilleusement choisi.

Mary Wigman dans la sorcière

Mary Wigman dans la sorcière

Ce techne a des relents Wigmanien.

Mari Wigman, c’est cette danseuse expressionniste allemande dont tout le monde aujourd’hui connaît la Sorcière grâce à youtube.

Sylvie l’a d’ailleurs dansé avec talent, on en voit un extrait dans un des documentaires qui lui est consacré.

Sur la scène,  une sorcière ou  une chamane exécute une danse autour d’un arbre en fil de fer – et là, on pense au génial décorateur de Martha Graham, Isamu Noguchi.  La danse commence pareillement au sol, et est toute en expressivité. On assiste à un rituel, quelque chose de mystique palpite. La nature semble presque palpable.  Le seul souci, c’est qu’il n’y a pas vraiment de progression, le langage tourne vite en rond et s’essouffle rapidement et là, commence à monter le sentiment que Guillem va chercher à prouver à son public que oui, elle a 50 ans, « mais regardez ce que je suis encore capable de faire »

Si bien que la forme, - la prouesse technique, en mettre   «  plein la vue » à son public - va prendre le pied sur le sens profond de cette œuvre qui aurait pu fasciner.

 Dans Techne, avec sa perruque brune aux cheveux mal taillés, ses grandes guiboles toutes maigres qui sortent de sa robe, le personnage qui apparaît au début intrigue, on veut en savoir plus…. quel est cet être qui sort de la nature et qui, tels les chamanes, devient l'une des créatures de ce monde si étrange? Est-ce après une fin du monde? Est ce au commencement de tout ? Est-ce une sorte de Sacre du printemps mais d'un style nouveau? Mais ce ne sera pas le cas, on ne saura rien d'autre, car  la TECHNE-IQUE va l’emporter sur l’expression artistique…. Dommage…. Un grand moment de poésie ratée…

 

 

Suit ensuite pour moi, le pire de l’après midi ; un duo plan-plan pépère de Forsythe… encore un qui veillit mal… dire que j’ai été une de ses fans dans les années 1980 ! Et bien, cette époque est révolue, ces dernières créations m’ont fait bailler d’ennui et ce duo m’a fait glousser à plus d’une reprise ; je serai bien sortie prendre l’air si je n’avais pas du déranger mes voisins pour revenir ensuite voir le second duo.

A noter pour la petite histoire, cette création de 2015 m’a rappelé mes cours de contemporain avec Mohamed Ahmada au centre du marais dans les années….1980 !

Suivait Here et After, de Maliphant, cette fois-ci

Je l’aime bien pourtant celui là…

Mais là, à nouveau, une œuvre bancale, mal fichue, qui une fois encore me rappelle mes vieux cours de danse contemporaine….

Ils ont donc si peu d’idées les chorégraphes contents pour rien ???

Avec deux corps et deux techniques aussi opposées, n’aurait il été pas plus judicieux d’exploiter ces différences, plutôt que de faire faire la même chose à Sylvie et à sa partenaire, soit en miroir, soit exactement de la même façon ?

On ne peut que comparer, et au désavantage, bien sûr de l’autre, et ainsi, on n’entre jamais dans l’œuvre

Et puis les carreaux qui s’éclairent façon Mickael Jackson dans Billie Jean, (encore les années 1980) bon, pas d’autres idées, messieurs les scénographes ???

 

L'arbre Isamu Noguchi pour Martha Graham

L'arbre Isamu Noguchi pour Martha Graham

Bye, Mats Ek

Bye, Mats Ek

Arrivait ENFIN, Bye, que j’adore

Mats Ek ne m’a JAMAIS déçue, non, c’est impossible, il sait mettre en scène l’humain, avec une tendresse inégalée, même lorsque le personnage est face à ses contradictions, sa lâcheté,  sa solitude, son apathie, son petit côté mesquin ou misérable… il n'a pas son pareil pour faire ressentir de l'empathie pour ces personnages anonymes et leurs petites ou grandes souffrances dans leur vie quotidienne, banale, mais au fond si humaines.

Alors pourquoi ça n’a pas marché là non plus ???

Parce que j’ai eu le sentiment que Sylvie voulait prouver et non pas qu’elle dansait…

Elle dit elle-même dans une interview qu’elle est obsédée par les détails, encore plus qu’avant et que surtout elle veut rester au même niveau qu’avant… et au fond, c’est sans doute cela que j’ai ressenti tout du long

La technique avant le reste….

Alors oui, c’est éblouissant de virtuosité, mais où est passé l’âme ?

Comment croire aux faiblesses de ce personnage alors qu’on a sur scène  une guerrière, une combattante qui exige que son  corps dise «  Non, je ne lâche rien de ma technique ! »

La maîtrise au final, s’est faite au détriment de ce petit supplément d’âme qui fait toute la différence….

 

Pour les applaudissements, je n’ai tenu que quarante secondes  et je me suis ensuite enfuie en courant ; autant j’ai ressenti l’an dernièr  pour Ciaravola ou Le Riche, une chaleur, un amour sincère, et j’ai pu me fondre à toute la salle, pour ne faire qu’un…

Là, beaucoup de cirque…. Sylvie mérite pourtant mieux.

 

Suis-je rentrée déçue ? Pas vraiment, parce que depuis Eonagata, je n’avais plus vraiment d’attente, je voulais juste être là, dimanche, pour lui dire Bye, je l’ai fait

Pour le reste, et bien, ma mémoire me la rejouera encore de nombreuses années. Merci Sylvie !

 

 

 

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21 juin 2015 7 21 /06 /juin /2015 08:37
photo sebastien mathé

photo sebastien mathé

Le ballet de José Martinez, empli de poésie est une œuvre extrêmement généreuse de part ces nombreux clins d’œil et référence au théâtre, au cinéma, au film et à la danse elle-même et les multiples chorégraphes que Martinez a rencontrés au cours de sa carrière; ces Enfants du Paradis font plaisir à voir, à revoir, même si d’un point de vue personnel le ballet néo-classique en remplacement de l’inénarrable répétition de l’auberge des Adrets et de ses trois auteurs puis de la représentation qui en suivra fait sortir le spectateur de l’histoire. Il est difficile ensuite de reprendre le fil de l'intrigue après les 10 ou 15 minutes de ce long passage.

Autre bémol, le manque visible de liberté que José Martinez a eue pour sa création, car obligé de se plier à la scénographie de François Roussillon – qu’on connaît pour ses documentaires sur la danse – qui elle-même suit pas à pas le film, peut-être par obligation.

Enfin, dernier double bémol, les scènes de mime un peu trop nombreuses pour le rôle de Baptiste à qui on aurait aimé voir confier une variation dansée supplémentaire.

Il n’en reste pas moins qu'on est sous le charme  d’une poésie qui se déploie au fur et à mesure comme le parfum du jasmin dans l'air des soirs d'été.

Les plus de ce ballet sont le langage chorégraphique qui personnifie magnifiquement chaque caractère  : lyrisme, cruauté, honnêteté, truculence, esprit calculateur, mesquinerie, petitesse dans la grandeur,méchanceté, douceur et faiblesse,  il est facile de reconnaître  chaque personnage du film pour lesquel Martinez a fait du sur mesure.

Cette année, il fallait accepter de se priver d’Isabelle Ciaravola dans le rôle de Garance. La distribution que j’ai choisie présentait de l’excellent et du moins enthousiasmant.

 

Vu il y a maintenant quinze jours, mais n’ayant pas eu le temps d’écrire le compte rendu pour diverses raisons, il me revient tout de suite à l’esprit  le lumineux Karl Paquette, qui décidément aura tout fait cette année, y compris revêtir le costume du lion pour le plus grand plaisir du public! Il n'y a que lui pour mettre en joie 2000 personnes, rien qu'en se costumant en lion!
Et il faut le voir s'envoler dans le ballet néo-classique et y déployer une technique solide, brillante, enthousiasmant de sa présence solaire toute une salle sous le charme.

Après son merveilleux Lucien dans Paquita, le retrouver dans un rôle aussi truculent est un vrai bonheur. Karl Paquette continue à donner beaucoup à son public qui l’aime de tout son cœur ; sans doute l’un des artistes les plus populaires actuellement à l’opéra de Paris.


Ganio est parfait en Baptiste , qui malheureusement n'est pas assez " dansant"; une ou deux variations supplémentaires au lieu des scènes de mime auraient été bienvenues,  car celles-ci directement sorties du film, font un drôle d'effet dans ce contexte; elles sont un peu fades, un peu longues, parce que JL Barraut est juste inégalable,  - et quand bien même on ne l'aurait jamais vu, il n'en reste pas moins que le mime filmé de près ne peut donner la même chose que celui-ci réalisé sur une grande scène de danse au milieu d'un ballet.   On regrette de ne pas voir autre chose que ce que l'on connait déjà ;  malgré cela, Ganio n’a pas son pareil pour susciter de la compassion pour son amour contrarié, ou nous faire ressentir les affres de l’amour dans le pas de deux final.


A ses côtés, un Lacenaire extraordinaire en la personne de Vincent Chaillet qui s'effile comme la pointe d'un couteau, est capable de  se recréer en deux dimensions pour  glisser comme une ombre inquiétante,  se montre cinglant,  ou brillant, génial ou vaniteux. Un personnage fait  de génie et de cruauté.
Un rôle sur mesure pour lui où il déploie une technique brillante et un jeu de haut vol

Zusperreguy,  incarne Nathalie avec vérité, émotion et finesse de jeu.  Il y a une toute petite scène avec elle, Ganio et un enfant de l’école de danse qui en quelques glissades évoque tout le  bonheur familial.  On m’a dit le plus grand bien de Mélanie Hurel dans le rôle, et je regrette de n’avoir pas vu une autre distribution pour voir cette belle artiste trop rare à mon goût.

 


Je n'ai pas du tout aimé la proposition de Pujol en Garance qui, trop effacée, trop douce, ou trop enfantine,  a du mal à faire un vrai choix pour incarner son personnage ; il est difficile de croire à son amour pour Baptiste;   sa relation avec F Lemaître ou avec le comte n'est guère plus convaincante. Ciaravola manque beaucoup dans ce rôle et on se fait la remarque que sans elle, les enfants sont bien orphelins.
La danse est belle, fluide, virtuose, comme souvent, mais on dirait qu'elle n'ose pas être Garance,  peut-être tout simplement pas fait pour elle.


La madame Hermine de S Romberg n'est pas non plus  formidable,  le jeu est trop appuyé; même commentaire pour le Comte de Benjamin , fade et pas assez hautain (quel contraste avec son excellent Mr de GM d'il y a un mois!

 

Les enfants du paradis - Martinez - ONP 2015

Le premier acte est joyeusement enlevé avec une troupe soudée, et malgré une scénographie très scolaire qui s'emploie à reproduire trop fidèlement le film, on se laisse très facilement emporté par toutes ces petites scènes qui se succèdent assez rapidement et  auxquelles Martinez insuffle beaucoup de vie.
Le second acte manque de ressort à tous points de vue, du fait de cette sorte d'alliance ratée entre les différents protagonistes de la distribution de ce soir là. Pech n’est pas assez présent, Garance non plus ; comme il s’enchaine au ballet néo-classique, on sort tout à fait de l’histoire et on devient spectateur du spectateur qu’on est….

Bien qu’ il n'ait pas du être facile pour Martinez de composer quelque chose de fluide sur un canevas  rigide, le chorégraphe en variant les clins d’œil multiples, les hommages et en exportant souvent le ballet hors de la scène a créé un propos inventif, sensible, parfois joyeusement désordonné  comme peut l'être un plateau de cinéma. Joli clin d'oeil que d'être   accueilli  par les personnages dès notre arrivée, de voir les tracts tomber du plafond pour nous annoncer à l'entracte  Othello dansé dans le grand escalier pendant que le ballet narratif est   répété sur scène avec Martinez himself en maître de ballet, ou de voir Garance traverser toute la salle pour disparaître loin de Baptiste par l'entrée des spectateurs à l'orchestre. Les pas de deux sont  vraiment superbes, poignants, les variations et les tableaux regorgent de vie et de créativité, les actions se superposent parfois dans un même espace, et cela très habilement:  que d'idées pour une seule oeuvre! On aimerait le voir créer d'un bout à l'autre autre chose rien que pour le plaisir de le voir libre et sans contrainte..

La musique, plaisante, a dû elle aussi se plier à la scénographie ce qui lui donne un petit côté collage musical comme dans les «  musicals », mais elle suit agréablement le ballet.
On regrette en sortant de n’avoir pas vu une autre Garance, et un découpage du film un peu plus libre afin que  tout le talent  des danseurs et du chorégraphe, José Martinez soient mieux exploités.

Les enfants du paradis - Martinez - ONP 2015
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23 mai 2015 6 23 /05 /mai /2015 09:16
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20 mai 2015 3 20 /05 /mai /2015 11:46
Sous la scène : moins 6 niveaux!!!

Sous la scène : moins 6 niveaux!!!

Tous à l’Opéra !

 

 

Quelle belle initiative que de permettre à un large public de visiter les deux théâtres nationaux – Garnier et Opéra Bastille -  d’assister à des projections, et à une répétition publique !

Cette année, ces visites étaient ouvertes à tout le monde; et nous espérons que l'an prochain, la même initiative sera reprise!

Je désire à travers cet article remercier particulièrement le technicien qui nous a accueilli si gentiment le samedi 9 mai  - hélas, j’ignore son nom - pour nous conduire à travers tous les méandres de ce monstre qu’est l’opéra Bastille et qui a répondu gentiment à nos questions.

Ce jour-là, la visite était assurée par le personnel technique de Bastille, tous bénévoles et heureux et fier  de nous montrer leur lieu de travail qui est l’envers du décor.

C’est toujours impressionnant de découvrir un monde d’un tel gigantisme !

On apprend ainsi que la scène est modulable à volonté en profondeur, et qu’elle s’adapte à chaque production.

Tout est créé sur place : décors, costumes, accessoires. Les ateliers sont immenses, des couloirs et des couloirs les relient les uns aux autres.

L’opéra ne  possède  que son ballet et son chœur d’opéra. Il a aussi pour le faire fonctionner une foule de techniciens, de costumiers, de perruquiers, de maquilleurs, de peintres, de sculpteurs, de décorateurs, d’habilleurs, de teinturiers, tous issus d’écoles prestigieuses.

  Ici, tout est immense mais tout est  pourtant fait dans le détail et la minutie : ainsi, on assiste médusé, à la pose un par un de cheveux naturels pour confectionner une perruque à la Louis XIV.

Soixante dix corps de métiers font fonctionner le monstre Bastille : cela va des techniciens de plateau, à ceux de la régie sons et lumières, des artistes aux  couturières,  des teinturiers aux coiffeurs, des agents comptables aux secrétaires, des attachés de presse aux ouvreurs, etc, etc, etc, comme disait le Roi dans Anna…

 

 

On apprend enfin que l’opéra rêverait de se doter d’une école afin de former directement des élèves à tous ces métiers en relation directe avec  la scène. On ne peut rêver d’un endroit plus inspirant que ces deux théâtres aux volumes impressionnnants. On se doutait bien que des lieux comme ceux-ci «  ne fonctionnent pas tous seuls » mais à présent, on aura un regard bien différent lorsque l’on reviendra voir un spectacle.  Et on se dit qu’il est bien dommage que tous ces métiers annexes ne soient pas connus ou présentés plus souvent au  «  grand public ».

 

 

Pose de cheveux naturels un à un

Pose de cheveux naturels un à un

Sous la scène

Sous la scène

Derrière la scène : les différents carrés accueillent les décors des spectacles en cours

Derrière la scène : les différents carrés accueillent les décors des spectacles en cours

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19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 16:20
Photo  : Philippe Laurent ONP

Photo : Philippe Laurent ONP

 

Paquita Hannah O Neil/ Mathias Heymann – le 16 mai à 14h30

 

 

Le hasard des chaises musicales made in ONP a fait que, ce samedi 16 mai à 14h30, Hannah O Neil a remplacé Alice Renavand et Mathias Heymann, Florian Magnenet. Quand on prend une place pour voir des danseurs qu’on aime, il y a deux solutions, la revendre quand le couple échu ne séduit guère, y aller quand même «  pour voir » ou bien faire contre mauvaise fortune bon cœur lorsque la nouvelle distribution offre de belles perspectives. Soupirs, et regrets de ne pas voir Florian Magnenet, magnifique dans le Chant de la terre cet hiver, ni la superbe  et sémillante Alice Renavand, maîtresse frivole et sensuelle de Lescaut, furent remplacés par la joie de retrouver la jolie et gracieuse Hannah O Neil, si belle en Odile cet hiver,  et Mathias Heymann qui était si rare ces derniers temps. 

 

Avec une distribution aussi prometteuse,  on se régale à l’avance d’un spectacle qu’on a déjà vu et adoré avec Hecquet/ Paquette et qui tient autant à la qualité de ses solistes qu’à celle du corps de ballet, particulièrement tonique, grisant, virtuose dans le grand pas final.

 

Hannah O Neil est une  Paquita ravissante et  piquante qui  respire la jeunesse, la gentillesse ; elle forme avec Mathias Heymann un couple adorable qui gagne de suite notre sympathie. Les pas de deux ont de toute beauté, et on admire le magnifique sourire d’Hannah  qui ne faiblit jamais même dans les plus grandes difficultés techniques.

 

Mathias Heymann campe un Lucien  encore très enfantin ; il forme avec Hannah un couple touchant, plein de grâce ; leur jeu, leur mime s’accordent bien et ont la rondeur et l’innocence de l’enfance ;  leur danse est harmonieuse et  à aucun moment, leur danse ne faiblit. Les pas de deux du dernier acte sont particulièrement beaux.

 

Même si on garde à part soi une préférence pour Hecquet/Paquette dans les mêmes rôles, tellement complices sur scène, elle un peu gouailleuse, lui, plein de noblesse et d’élégance,  on est touché par cette autre interprétation de Paquita, plus novice, sans doute, mais sincère, et portée de bout en bout avec talent et délicatesse.

 

On retrouve avec plaisir aussi le corps de ballet, un peu moins parfait cet après midi là dans le grand Pas de deux, mais toujours aussi heureux d’être en scène.

 

Une fois encore, le pas de trois du premier acte ne décolle pas malgré le talent de Marc Moreau ; mais on se console en regardant au second acte les deux officiers bondissants, Daniel Stockes qui a mangé du lion, et Florimond Lorieux, qui, s’il est moins flamboyant, n’est en pas moins resplendissant. On se souvient avec plaisir du premier dans le rôle de Fritz, le frère de Clara, dans Casse Noisette, et du second, dans le pas des Pierres précieuses de Casse Noisette.

 

Les enfants de la Polonaise semblent un peu fatigués   mais sont toujours aussi craquants, avec leurs costumes hongrois et leurs coiffes à plumes qui oscillent de gauche et droite au rythme de la danse.  

 

Et on sort de cette matinée avec une bouffée de joie, d’enthousiasme, de plaisir, d’avoir vu de la belle danse, malgré les petits bémols indiqués plus haut.

 

Hannah O Neil, âgée de 21 ans seulement, est, à la sortie des artistes une jeune femme toute douce, timide, tellement simple qu’on admire d’autant plus son aura et son sens de la scène.  On apprend, étonné,  que le soir même, elle regagne  le corps de ballet pour redanser Paquita… et on croise Letestu,  visiblement ravie  de ce qu’elle a vu, et qui était déjà présente lors du Lac des Cygnes avec cette même Hannah.

 

Alors oui, Hannah O Neil n’a pas encore le métier d’une Laura Hecquet, et Mathias retrouve tranquillement ses marques sur scène ; la pantomime est moins aboutie, par exemple; mais quel plaisir de voir des artistes engagés, convaincus par ce qu’ils font, après être sortie tant de fois déçue d’un spectacle où tout le monde, en mode  «  minimum » semblait faire son métier en bon fonctionnaire d’état,  sans conviction ni plaisir.

 

Le plaisir semble être de retour sur scène… s’il est là, le public en trouvera lui aussi, et on se prend à rêver que, petit à petit,  le ballet  retrouve tout son panache.

 

Hannah O Neill- Mathias Heymann/ Paquita ONP : le charme de la jeunesse
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14 mai 2015 4 14 /05 /mai /2015 22:19
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11 mai 2015 1 11 /05 /mai /2015 11:13
L'histoire de Manon : Dupont/Bolle- 8 mai 2015. ONP

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" Il suffisait de presque rien"

 

 

 

On sort de cette représentation avec la vague impression qu’une promesse faite au premier acte n’a pas été tenue.  Pourquoi ? On ne sait pas vraiment, et peu importe ; on emporte avec soi sa frustration, et on se repasse en boucle les souvenirs soigneusement conservés des deux plus beaux Manon jamais vus : Guillem/ Hilaire et Ciaravola/ Ganio

Et pourtant, le  premier acte fut  brillant – c’est d’ailleurs un acte particulièrement équilibré - avec ses scènes de foule et de mondes différents qui se côtoient sur la place où les voitures à cheval déposent leurs voyageurs, avec ses rôles mimés, sa charrette des filles qu’on envoie en Louisiane et qui passe comme un funeste présage. Mime, variations, pas de deux, rencontres nombreuses, tout s’enchaîne avec brio. Le cadre se met magnifiquement en place et les différents acteurs aussi.

Aurélie Dupont est une Manon particulièrement belle, même si elle n’est pas exactement celle qu’on s’imagine à la lecture du roman,  décrite comme déjà bien « dégourdie ». Celle qu’on voit ce soir-là à un quant à soi, une réserve qui tiennent à distance certains messieurs trop empressés. Encore un peu, et elle leur enverrait une gifle !

Son frère, - Stéphane Bullion -  joue rapidement les  entremetteurs car  il réalise les avantages qu’il peut tirer de Manon en voyant le puissant Monsieur de GM – Benjamin Pech, impeccable – lorgner sur elle avec concupiscence. Mais une réelle tendresse le  lie à Manon

 

La première variation du Des Grieux de  Roberto Bolle un peu raide, un peu scolaire, un peu appliquée nous laisse supposer que le danseur est mort de trac ? Ses jambes tremblent, son jeu est inexistant.

 

Du côté des mendiants, Madin incarne plus un  prince déchu qu’un pauvre hère que le destin n’a pas favorisé, - et pourquoi pas après tout, la Fortune faisant et défaisait les choses -  sa danse bondissante et altière trouve un formidable écho auprès  de ses énergiques compagnons de misère,   chapardeurs et canailles à souhait et à l’affut du moindre sou pour survivre.

Les danseurs s’amusent et nous aussi.  

 

Au premier  pas de deux dans la chambre, un grand souffle passe entre Manon et Des Grieux et on est touché par leur fraîcheur,  leur jeunesse, leur passion : on les regarde tous deux avec tendresse et émotion ; complices de leur bonheur naissant, on leur souhaite le meilleur à venir; c’est d’une beauté à couper le souffle. La danse légère, fluide, vibrante, passe sans effort des deux côtés. Les deux danseurs sont en osmose : le jeu est subtil, ni trop ni pas assez appuyé.

Le premier acte s’achève et nous voilà le cœur débordant d’émotion et  mis dans une attente particulière.

 

Malheureusement,  tout ceci, retombe à l’acte suivant.

Aurélie  incarne une courtisane assez peu heureuse d’exercer son métier, et il est difficile de  comprendre ce qu’elle ressent vraiment et pour Monsieur de GM et pour Des Grieux. Contrainte et forcée d’être ici, elle subit la situation et n’en retire pas le moindre plaisir ; elle remplit les caisses, c’est tout !  On   voit un personnage que la misère épouvante et qui préfère sacrifier une passion que de vivre d’amour, d’eau fraîche et de haillons mais jamais une jeune femme sensuelle qui s’étourdit dans la vie nocturne.  Elle ne semble pas non plus émue ou troublée lorsqu’elle revoit son amant ; ni même embarrassée ; elle a simplement l’air fâchée, comme une mère dérangée dans son travail par ses enfants trop bruyants.    De son côté, Roberto Bolle a du mal à trouver sa place à tous points de vue dans ce salon.

Alice Renavand en maîtresse, tire magnifiquement son épingle du jeu ; mutine, taquine, complice avec son amant, - elle semble avoir l’habitude de le voir souvent ivre, et ça ne l’embête pas plus que ça !  – elle parade avec sensualité dans ce salon des plaisirs, à l’aise comme un poisson dans l’eau. Sur une danse féminine, ronde, pleine de la promesse de plaisirs qu’elle accordera plus que généreusement, son regard pétille comme le champagne qui emplit sans cesse les coupes alentour. Son pied et son regard  harponnent les riches messieurs ;   la maîtresse s’amuse.

 Les autres  courtisanes aguichent,  se crêpent le chignon, passent de bras en bras, tentent de se refiler le vieux libidineux ; l’atmosphère licencieuse du lieu est magnifiquement rendue aussi bien par les costumes, somptueux, que par les décors, les grands miroirs, les éclairages et le jeu du corps de ballet.

Monsieur de GM antipathique à souhait, se sait puissant parce qu’immensément riche. Son regard toise ses compagnons comme s’ils ne méritaient pas d’être prêts de lui et il exhibe Manon à son bras comme un bien supplémentaire ; il  a l’instinct du propriétaire, et pas l’âme d’un amant.

Grâce à tous ces protagonistes, la scène du jeu de cartes relance un peu l’action qui était en suspend et le drame se renoue avec vigueur et conviction. Drame qui atteint son point culminant quelques instants plus tard avec la mort de Lescaux, pour qui on éprouve une vraie compassion. Toute crapule qu’il était, il ne méritait pas autant de violence et une fin aussi abrupte.

Auparavant, on aura assisté à la dispute des deux amants,  qui se chamaillent comme des enfants en désaccord sur le jeu auquel ils vont jouer plutôt sur la tournure que doit prendre leur vie.

Dupont a montré un visage trop sévère dans le salon de Madame pour qu’on la croit vraiment contrariée de quitter sa vie  de courtisane; elle ne semble pas non plus très touchée de retrouver son amant qui a du mal à faire entendre sa voix.

 

Avec l’acte 3, cette impression de jeu qui n’aboutit pas se confirme

Le geôlier de Karl Paquette garde son regard de hibou réveillé en plein jour dans toute la première partie,  et les violences qu’il  fait  subir à  Manon semblent vraiment pour de faux.

 

Je revois encore Mathieu Ganio tout prévenant,  porter le petit sac de Manon/Ciaravola à la sortie du bateau et sembler vouloir souffrir à sa place ; là, rien ne se dessine vraiment. Roberto Bolle est toujours aussi encombré de lui-même.

On arrive presque à croire que  c’est le geôlier qui est pleuré à chaudes larmes lorsque Des Grieux le tue et non pas la situation dans laquelle les deux amants se retrouvent alors.

Et le tout dernier pas de deux manque de cet abandon qu’on trouvait chez Guillem et Ciaravola, avec un Des Grieux qui les porte  à bout de bras et leur insuffle autant de vie qu’il peut.

Une fois encore, le jeu est trop maîtrisé. On voit des pas, et pas une histoire. Manon meurt sans qu’on ressente vraiment d’émotion, ce qui est quand même un comble pour ce ballet

 

Mais avant, il y aura eu les filles de Louisiane, écrasées de chaleur, réduites à rien à la sortie du bateau, les passants, compatissants, embarassés ou  dégoûtés, et on aura ressenti à ce moment là une vraie tendresse pour ces malheureuses qui échouent à la Nouvelle Orléans pour être ensuite distribuées à qui voudra.

 

Le rideau tombe et on se dit «  quel dommage…. Il suffisait de presque rien pour que les actes 2 et 3 nous emportent comme le premier. »

Et de retour chez soi, on chercher sur youtube les vidéos de Guillem et de Ciaravola/Ganio...

 

 

 

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Published by Shabastet - dans opéra de paris
7 mai 2015 4 07 /05 /mai /2015 16:20
Photo Laurent Philippe

Photo Laurent Philippe

 

 

Paquita, ballet bavard et un peu creux, est devenu  par la magie de ses interprètes et du corps de ballet, une œuvre réjouissante, poétique, enjouée, et complètement enthousiasmante au dernier acte  ce lundi 4 mai 2015 ! Quelle apothéose ! Miracle rendu possible grâce à  un Karl Paquette  radieux et  une Laura Hecquet inspirée : leur complicité, leur sens du théâtre, leur générosité en scène, leur  art de la narration accomplie a transformé un ballet primesautier et sans grande profondeur en une véritable œuvre d’art.

Ces deux magiciens  nous ont promenés dans cette histoire abracadabrante sans qu’un seul instant on se demande s’il fallait la croire ou non !   

 

Comment décrire toutes les nuances et subtilités que Laura Hecquet possède au-delà de ce qu’on aurait cru possible ?  La technique ? On l’oublie, tant  tout coule de source quand elle danse : elle scintille, elle brille, elle s’envole, elle tourbillonne, elle s’amuse, elle rêve, elle taquine, elle protège, elle aime… avec une telle facilité, une telle aisance, qu’elle parvient même à dire plusieurs choses en même temps. Dès son entrée en scène, on ne la quitte plus des yeux. Sous  la facilité, la légèreté, la précision de sa danse, se cache une puissance vertigineuse et une virtuosité qui jamais n’est étalée au grand jour. Le moelleux de ses pliés, la grâce suspendue de ses équilibres, la souplesse de son buste et de ses bras,  la force de ses pieds et de ses jambes qui donnent à ses fouettés légèreté, ampleur et poésie,  en font une « prima ballerina  absoluta ».  Son art n’apparaît pas, n’est pas étalé, ni démontré : il transparaît.

Et puis quel bonheur de découvrir chez Laura des dons de comique, ce qu’aucun des rôles qu’on lui avait confiés jusqu’alors ne pouvait laisser présager… on rit de ses facéties et de ses «  réparties » au premier acte, - elle n’a pas sa langue dans sa poche mais taquine, agace, sans la moindre once de vulgarité, et on s’émerveille de son sens de l’à-propos au second acte ; on l’imagine très bien en Ballerine dans le Concert de Robbins ; d’ailleurs on l’imagine très bien en tout : Juliette, Manon, Giselle, Raymonda, tout lui irait… le ballet a de ces temps de pause pendant lesquels on continue à voir Laura danser tous ces rôle au lieu de regarder le corps de ballet faire passer le temps… Avec Laura, Paquita devient un vrai personnage, amusant, attachant, vif, et profond… oui, assurément, du grand art !

Photo IK Aubert

Photo IK Aubert

A ses côtés, Karl Paquette, Lucien D’Hervilly au grand cœur, donne la réplique à Paquita avec spiritualité (ce qui n’était guère de cas de Inigo ce soir là, qui n’avait que quelques mots de vocabulaire prononcés brutalement et  sans verve ni énergie !)  Sa blondeur, son élégance sont déjà un atout pour ce personnage raffiné qui, aux côtés de Laura  est tellement  galvanisé que  sa danse   prend feu :   énergie, brillance, fantaisie, prouesse, Karl Paquette s’est surpassé et il semblait tellement heureux de danser que son plaisir était contagieux !

Les pas de deux avec Laura Hecquet  étaient un régal de drôlerie, de poésie, d’intensité… 

 

Pour le troisième acte,  le corps de ballet a composé un écrin de premier choix aux deux protagonistes : tout le monde semblait vouloir donner le meilleur de soi même ce soir là, et les pointes étaient affutées comme des couteaux, les petits pas étaient ciselés comme par un orfèvre, et tout la belle technique classique était déployée et étalée comme l’argenterie et le cristal de  la vaisselle des grands jours dans un château… comme Pierre Lacotte devait être ravi !

Un mot supplémentaire  sur les deux officiers Daniel Stockes et Jean Loup Quer qui dansaient avec panache !

 

 

On serait injuste d’oublier les adorables enfants de l’école de danse, parfaits et frais dans leur  Polonaise, aux figures tarabiscotées.

Et tout aussi injuste  d’oublier le chef  Fayçal Karoui qui a su insuffler à l’orchestre des lauréats du conservatoire de la poésie  et beaucoup de tenue. Que demander de plus à une musique composée par l’obscur Deldevez à laquelle Minkus a rajouté ses propres mesures ?

 

 

A lire  : portrait de Karl Paquette écrit en 2009, lors de sa nomination

 

A Lire : portrait de Laura Hecquet, écrit lorsque Laura était   sujet, en juin 2014

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